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Valse à 4 temps

Je vais commencer par me débarrasser de cette confession pour ne plus avoir à y revenir : la saison 4 n’est pas ma préférée, loin de là. Beaucoup d’épisodes m’ennuient et d’autres m’énervent carrément. Je trouve cela d’autant plus dommage qu’il me semblait important de ne pas louper cette introduction à la vie dans les colonies, si riches en sujets à exploiter : les tribus indiennes, l’esclavage, la colonisation, la migration, la reconstruction des clans et surtout, la famille qui se réunit à travers le temps ! Bon sang, Diana Gabaldon offre tant de pistes à explorer qu’il n’y a qu’à tendre la main pour cueillir le fruit ! 

 

Cela dit, après avoir digéré ma déception, j’ai pris la peine de la visionner une seconde fois. Débarrassée de l’attente exacerbée; de l’espoir disproportionné; de ma propre perception du tome 4 de la saga littéraire, je suis parvenue à mieux apprécier la saison en son ensemble.   

Il y a malgré tout de très beaux moments, notamment le prodigieux cheminement de Roger, petit professeur d’histoire étriqué et un tantinet agaçant, devenant ce personnage incroyablement courageux et empli d’humanité. Il y a la douce maturité qui s’installe dans le couple de Claire et Jamie, le retour de Murtagh – quel bonheur – ! La rencontre avec le touchant quoiqu’un peu irritant William Ransom et surtout les quelques instants passés avec le merveilleux Lord John. Il y a cette force de la nature qui est Jocasta Cameron ! Il y a encore, la belle évolution de petit Ian en homme de valeur, et bien sûr, les retrouvailles avec Brianna ! 

Oui, il y a tout ça, et pourtant, je ne parviens pas à m’ôter de l’esprit que la quatrième saison ne sert qu’à faire le lien entre la trois et la cinq.  

Voilà, c’est dit, ce n’est pas très grave et surtout, ça ne tient qu’à moi. Maintenant, passons au cœur du sujet qui nous réunit ici : le final. 

  

Les deux épisodes, « providence » et « un homme de valeur » (que je ne peux séparer tant ils s’articulent de concert) ont cette particularité de faire s’entrecroiser 4 arcs indépendants qui finiront pas se regrouper. Des histoires parallèles qui mettent en scène un personnage central et un soutien indispensable. 

  

1 — le chemin de croix (pour ne pas dire, la descente aux enfers) de Roger qui semble ne jamais vouloir cesser, avec, en miroir, sa rencontre avec le prêtre français, Alexandre Ferigault. 

2 — En parallèle, le parcours déchirant et à nouveau solitaire de Brianna puis son amitié avec Lord John. 

3 — La prise de risque de la part de Fergus afin de libérer Murtagh d’un emprisonnement qui le mènera à coup sûr à la potence, soutenu et épaulé par Marsali, comme toujours. 

4 — La quête douloureuse de Claire et Jamie afin de retrouver Roger tout en essayant de pardonner, à soi-même et aux autres, et la posture de Ian qui s’offre en échange pour permettre à Jamie de tenir sa promesse. 

Roger 

 

L’épisode « providence » ouvre sur l’arrivée de Roger au camp mohawk, Sadow Lake, et ce, après de longs mois de marche forcée à travers la forêt. Il est épuisé physiquement et moralement, qui ne le serait pas après ce calvaire ? Seul son désir de retrouver Brianna le maintient en vie. 

Les Mohawks le bousculent, l’observent comme un animal étrange, mais il ne comprend rien, trop stupéfait et ereinté pour percevoir l’importance du rituel qui s’organise autour de lui. Une haie l’encadre, non pas pour l’accueillir, semble-t-il, mais pour le frapper, encore, toujours. Son épaule se fracasse, finissant de mettre à mal son corps en souffrance. 

Vendu par les siens – marque de déshonneur suprême –, il est jugé indigne d’être un membre de la tribu, tout comme il n’a pas été à la hauteur, apparemment, afin d'être membre de la famille Fraser. 

À nouveau jeté à terre, la sentence tombe, « tu resteras prisonnier, tu ne seras pas des nôtres ». Une jeune femme lui donne un nom : Ehhaokonsah… tête de chien. 

Alors son esprit se brise également. 

  

Sa rencontre avec le père Alexandre Ferigault nous permet de prendre conscience de son évolution. Lorsque le prêtre lui explique qu’il préfère mourir plutôt que de baptiser son enfant, car il ne s’en estime plus digne au regard de Dieu, Roger l’invective à ouvrir les yeux. 

« Tournez le dos à l’amour, et privilégiez votre liberté » ! lui dit-il à bout d’arguments. Et on ressent fortement dans ce propos, le poids des tourments qui le rongent. Lui-même paye le prix de son entêtement à aimer, qui l’a fait traverser les pierres; s’embarquer pour l'Amérique puis renoncer finalement à rebrousser chemin alors qu’il en avait miraculeusement l’occasion durant de sa courte échappée. Mais ces longs mois de douleur l’en ont guérit pense-t-il. Oui, il cessera d’être un idiot, car aimer l’a presque tué. 

Le peu d’énergie qui subsiste en lui, il s’en servira pour fuir et rentrer à son époque, à l’abri des Indiens, à l’abri d’un siècle plein de dangers, à l’abri de l’amour même. Il reste combatif, mais par rage, par refus d’endurer les violences répétées.  

La colère est son moteur. 

 

Et il y est presque ! Dehors, il court à travers bois vers le cercle de pierres, profitant de l’inattention de ses gardiens trop occupés à contempler le prisonnier français subir la morsure des flammes. Mais c’était compter sans son humanité. Parce que ce renoncement, ce n’était qu’un vernis pour survivre. 

Les cris du prêtre l’empêchent d’abandonner, de fuir, de se renier. Dès lors il rebrousse chemin et sauve son âme au détriment de son corps. Tout comme Ferigault a choisi le supplice plutôt que de renier sa foi, il choisit l’amour. Il choisit d’être un idiot, en toute conscience. 

D’une certaine manière, en écourtant l’agonie du prêtre et en se laissant capturer une nouvelle fois par les Mohawks, il prouve qu’il est digne d’être l’un des leurs. Mais cette fois, ce sont eux, stupéfaits, qui ne comprennent pas. « Tête de chien » il est, et le restera à leurs yeux,  alors qu’à cet instant, il n’y a pas plus humain que lui. 

 

On ne nous dit pas comment Roger vit cela par la suite, seul dans cette prison de branches et de feuilles dans laquelle le Français n’est plus. Probablement attend-il la mort à son tour, comme une fin en soi. Pourant,  lorsque les Fraser sont enfin là pour lui, il est prêt à les suivre. 

  

Je me suis fait la remarque durant les dernières négociations avec le chef Tehwahsehwkwe qui refuse de le laisser partir, que Roger n’intervient pas, ni pour défendre sa cause ni pour convaincre Jamie ou Ian de ne pas se sacrifier pour lui. Et puis, j’ai réalisé que, de son point de vue, ces deux-là le lui devaient bien ! Ce sont eux à l’origine de l’enfer qu’il vient de traverser, et ce n’est que justice qu’ils proposent désormais d’échanger leur place.  

À bien y regarder depuis le tout début, Roger est le seul à n’avoir fait aucune erreur, à n’avoir jamais menti, si ce n’est peut-être lorsqu’il a caché (quelques jours à peine) à Brianna l’existence de la coupure de presse à propos de l’incendie, et encore, ne l’a-t-il fait que parce que Fionna le lui avait demandé. Roger est un pur qui n’a rien à se reprocher, bien au contraire, il aurait largement de quoi en vouloir aux uns et aux autres et désirer ne plus jamais les revoir. 

  

Finalement Ian prend sa place et Roger repart avec Claire et Jamie. Il peut exprimer sa rage en frappant Jamie à son tour, jusqu’à épuisement, juste avant d’apprendre ce qu’a vécu Brianna. Son calvaire paraît sans fin, les drames et les injustices se suivent avec une régularité diabolique comme des perles sur un fil.  

Les Fraser le pressent, le menacent, font peser sur lui les responsabilités passées et à venir, à lui qui n’a plus qu’un souffle de vie, un souffle d’espoir ! Dans ce Nouveau Monde, il semble qu’il faille toujours prouver qu’on est digne, au-delà de toute raison. 

Il demande du temps Roger et c’est en effet ce dont il a besoin plus que tout autre chose. Du temps pour retrouver sa juste place dans sa propre vie. Reprendre les rênes de son existence et de sa destinée. 

  

Lorsque finalement nous le retrouvons à River Run dans les bras de Brianna, il est transformé. 

Il n’est plus le professeur d’histoire du 20e siècle. Il n’est plus ce voyageur apeuré sous la coupe de Bonnet. Il n’est plus « tête de chien » à la merci des Indiens, ni même ce gendre malmené par la superbe de Jamie Fraser. Non, il est un homme accompli qui peut dès lors réclamer son dû. Sa femme, son fils, sa place légitime dans le Nouveau Monde. 

Focus sur les épisodes :

"Providence " et "Un homme de valeur"

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Par Valérie Gay-Corajoud

Brianna 

 

Ce qui est certain, c’est que l’arrivée de Brianna dans le 18e siècle n’aura pas été plus simple que celle de sa mère ou celle de Roger.  

La voilà enceinte, soit de l’homme qu’elle aime, soit de l’homme qu’elle déteste, obligée de se mettre sous la coupe d’une grand-tante, certes aimante, mais également esclavagiste et intrigante !  Étragement, entre les mains de Jocasta, Brianna est plus que jamais en danger, aux prises avec les règles sociales d’une époque où la femme est soit une épouse, soit une putain. 

Elle doit absorber tout à la fois le traumatisme d’un viol, l’angoisse délétère à propos de ce que vit Roger, la colère sourde contre son père et son cousin, et finalement les intrigues incessantes de sa tante qui n'a de cesse de la jeter dans les bras d’un nombre conséquent de prétendants. 

Depuis son arrivée, elle n’a jamais été aussi entourée, et paradoxalement, elle n’a jamais été aussi seule. Elle expulse une partie de son tourment à travers ses dessins qui lui permettent d’exprimer ce que personne n’est en mesure d’entendre, mais cela ne peut suffire bien sûr. 

  

Heureusement, lord John Grey la rejoint, alors tout change. 

John est une extension de la protection paternelle qui l’autorise à redevenir fille. Elle peut dès lors cheminer vers le pardon par l’intermédiaire de John, ce qu’elle n’aurait peut-être pas put faire face à son père, leurs deux colères se nourrissant l’une l’autre. 

Elle a bien failli tout gâcher pourtant ! en essayant de le manipuler et en faisant peser sur lui un immonde chantage. Heureusement pour elle, John n’est pas homme à juger à la hâte. Il a bien saisi que Bree n’est qu’une jeune fille acculée et terrifiée. Alors il ne lui en veut pas et décide de la soutenir, s’interposant entre elle et les autres prétendants, ce Forbes notamment, qui souhaitait l’épouser au plus vite afin de prendre possession des biens de Jocasta Cameron. 

Sous la protection de John Grey, Brianna retrouve ce qui lui manquait plus que tout : le temps d’attendre le retour de Roger et donc, la possibilité de garder espoir. 

  

Outre le lien avec Jamie et la protection maritale dont elle avait besoin, John est également celui qui va permettre à Bree de parler à Bonnet et de mener à bien ce que son père lui a conseillé de faire : pardonner, ou tout au moins détacher définitivement la haine qu’elle éprouve pour cet homme de l’enfant à venir. C’est primordial pour elle, vital même. 

   

D’un point de vue purement scénaristique, il est intéressant de constater que le point de jonction entre les 4 arcs narratifs se situe au moment où John prend connaissance de la lettre que Jamie a adressée à Brianna. 

En effet, nous rejoignons les Fraser en route pour Shadow Lake afin d’y dénicher Roger, Brianna et John lisant les propos de Jamie à propos de Bonnet que Murtagh était censé retrouver avant d’être arrêté à son tour, obligeant Fergus et Marsali à organiser son évasion. 

  

Lorsque John accepte la requête particulière de Brianna, le bébé bouge dans son ventre, comme si, à cet instant précis il avait le droit d’exister. « Il est bien là », constate John. « Oui, je sais », lui répond-elle. Enfin, elle n’est plus seule à porter la responsabilité de cet enfant à venir. 

  

Brianna part donc avec John à Wilmington afin de se confronter à son agresseur, enchaîné, certes, mais n’ayant rien perdu de son arrogance. Il est si facile de le détester ! 

Cette rencontre permet à Brianna bien plus qu’exprimer un pardon qu’elle a du mal à accorder. Elle peut dire à Bonnet, droit dans les yeux, que cet enfant n’aura rien à voir avec lui. En exprimant cela haut et fort, Bree peut définitivement séparer l’enfant à venir de ce père qu’elle réfute. Rien de ce qu’il représente n’ira à cet enfant. 

« Je n’ai pas d’autre choix que de vivre avec ce que vous m’avez fait, mais vous serez vite oublié. Jamais il ne connaitra votre nom, ni même votre existence ». 

Elle est là, la porte qu’elle referme sur le passé. Le traumatisme restera à sa place, accolé à la brutalité du viol, et non à la vie de son bébé. 

«  Pendant que vous pourrirez six pieds sous terre, j’élèverai MON enfant avec le respect des bonnes valeurs, il n’aura rien en commun avec vous ». 

Je ne peux m’empêcher de penser qu'elle fait un réel cadeau à Bonnet, car non seulement elle lui « offre » un enfant, donc un avenir alors qu’il va bientôt mourir, mais également l’assurance que cet enfant sera une bonne personne et non un bandit comme lui-même l’a toujours été. 

  

On peut prendre également un petit moment pour se demander si, à ce moment-là, Brianna est persuadée que Bonnet est bel et bien le géniteur. La manière qu’elle a de l’affirmer le laisse supposer. Pour autant, il est possible qu’elle décide de ne pas parler de Roger à Bonnet pour ne pas lui offrir de sa vie plus que nécessaire. Peu importe ce que pense cet homme puisqu’il est destiné à périr dans la semaine. Ce qui compte ce n’est pas lui, mais elle. 

Alors qu’elle en a fini avec lui, elle croise le chemin de Fergus et Murtagh. La prison explose. Tout le monde croit que Bonnet est mort. La vie peut reprendre son cours. 

  

Elle accouche finalement, soutenue par sa tante Jocasta et la merveilleuse Phaedre (Impossible de ne pas souligner ici l’énorme différence avec la version originale de Diana Gabaldon qui a fait rentrer Claire à temps pour assister sa fille !) et n’a plus d’autre choix que d’attendre le retour de son époux ou l’annonce de sa mort. 

John est parti, mais Murtagh a pris le relais. Il y a toujours, au-dessus de Brianna, un ange protecteur envoyé par son père. En a-t-elle conscience ? Pourtant elle semble aller mieux. Peut-être est-ce la rumeur de la mort de Bonnet, ou la présence de son bébé, à moins que ce ne soit plus simplement l’acceptation d’un temps sans maîtrise. 

Lorsque, de retour,  ses parents lui annoncent que Roger est en vie, mais qu’il faut patienter encore afin de savoir s’il a décidé de rentrer, le cœur de Bree se déchire à nouveau. Le petit a deux mois nous dit-on, donc elle n’a pas revu Roger depuis presque un an ! 

 

Heureusement, l’attente ne durera pas plus, car il revient enfin vers elle et son enfant. Leur calvaire solitaire prend fin à cet instant. Du moment où ils sont réunis, tout pourra se mettre en place. 

Fergus 

 

Le jeune frenchi a toujours été le grand oublié des scénaristes du moment où il est devenu un homme et j’ai été vraiment heureuse qu’une place plus importante lui soit offerte dans ce final. 

C’est assez peu expliqué dans la série, mais depuis leur installation à Wilmington, son handicap lui ferme les portes les unes après les autres dans sa recherche d’un emploi et Fergus souffre de n’être pas en mesure de subvenir aux besoins de sa femme et de son fils. 

La requête de Marsali auprès de Murtagh afin de lui proposer de rejoindre les régulateurs nous le fait comprendre à demi-mots : Fergus n’a pas le sentiment d’être un homme accompli, et il est urgent que quelqu’un lui donne sa chance, quitte à ce que cela le mette en danger. 

Il s’avère que l’occasion viendra à deux reprises et qu’il se révèlera être  à la hauteur.   

Premièrement dans la recherche de Stephen Bonnet afin que Jamie puisse assouvir sa vengeance. 

Puis de manière plus prononcée encore — puisque ne répondant plus au souhait d’un autre, mais émanent de sa propre décision — dans l’organisation de l’évasion de Murtagh.   

  

Lorsqu’il annonce l’arrestation de Murtagh à Brian et Malachi, il a cette phrase d’importance : « Il a pris ses responsabilités, je ne le laisserai pas être pendu ». La question ne se pose pas pour Fergus. Les régulateurs l’aideront, mais il est certain qu’il l'aurait fait même sans cela. 

N’oublions pas le temps passé qui le lie à Murtagh lors de la deuxième saison, que ce soit à Paris où en Écosse durant la rébellion. Ils se connaissent depuis des années et ont beaucoup d’affection l'un pour l'autre. C’est donc en son nom qu’il va le sauver et pas seulement parce que c’est le parrain de Jamie. 

  

Le voilà donc en train d’organiser l’évasion. Marsali le découvre et le soutien, qui ça étonne ? Lui apparemment ! qui n’a jamais eu l’occasion de faire valoir ses qualités ouvertement. Il doute de lui, se désole de l’absence de Jamie qui aurait su quoi faire ! En parallèle, Marsali se désole de l’absence de Claire. Il est évident que l’un et l’autre ont vécu jusqu’alors dans l’ombre du couple Fraser auquel il est difficile de se mesurer. 

« Qu’auraient-ils fait à notre place ? », se demande Fergus. « Ils auraient trouvé une solution », lui répond Marsali. « Aie confiance en ton plan », ajoute-t-elle. 

Et c’est ce qu’il fait. Il organise et mène à bien cette évasion en prenant la tête de la petite troupe, lui qui a toujours été le suiveur. 

 

Dans la prison, ils croisent Brianna et lord John. Là encore il intervient. Il est le médiateur entre Murtagh et le Britannique Lord John, qui symbolise le pouvoir tout puissant de la couronne. Il se tient au centre d’un conflit d’importance et parvient à maintenir un statu quo, le temps de délivrer Murtagh. 

Il a l'idée de faire exploser la prison afin d’effacer toutes traces pouvant mener jusqu’à eux. 

 

Mission accomplie. Le jeune couple peut enfin rejoindre Fraser’s Ridge, là où Fergus aura sa place, là où il ne sera plus un handicapé, mais le fils de la maison Fraser. 

  

Claire et Jamie 

 

Cela fait bien des années que Claire et Jamie sont parents. Parents de Fergus, par adoption, parent illégitime de William et de remplacement pour Joan et Marsali du côté de Jamie, parents de substitution pour Ian depuis la Jamaïque, et surtout, parents de Brianna. 

Mais c’est la première fois qu’ils se trouvent être parents de Bree au même instant. C’est la première fois que Jamie peut jouer son rôle de père et que Claire est tiraillée entre son époux et leur fille. 

Bree, la bien surnommée, est source de joie dans la famille, mais également, et quasi immédiatement, source de problèmes. Sa présence aurait pu n’être que jubilation, mais les conditions de son arrivée sont dramatiques. Viol, grossesse, et surtout, le désastreux malentendu à propos de Roger pour lequel chacun doit porter sa part de responsabilité.    

Brianna pour n’avoir pas évoqué Bonnet plus tôt et Claire pour l’avoir caché à son tour. Quant à Jamie, ma foi, bien que nourrie par un sentiment protecteur envers sa fille, sa rage presque meurtrière n’a laissé nulle place à Roger pour une tentative d’explication. Bien évidemment, il ne s’en vante pas auprès de sa famille. Et, comme pour clore définitivement cette boucle infernale, voilà que Ian vend Roger aux Mohawks sans même prendre la peine de prévenir son oncle. 

Comme nous le savons, ce quadruple secret aura des conséquences dramatiques. 

  

Dans l’épisode « Providence », les Fraser sont absents à l’écran, hormis lorsque John lit la lettre de Jamie dont la voix off nous berce de son message apaisant. Nous avons le sentiment qu’au-delà des hautes montagnes qui les séparent, il continue d’être ce père bienveillant qu’il a toujours souhaité incarner. Sa parole est sage, ses mots sont mesurés, sa présence est rassurante. 

  

Ils ne sont pas là, et pourtant ils sont sans cesse représentés.  

Par John pour commencer, qui avoue à Bree son attachement à Jamie durant le diner chez Jocasta, puis lors de leur conversation dans le parc où il admet penser à lui en permanence, mais également à Claire, car le couple est indivisible.  

Ils sont là encore par le biais de Murtagh qui part en quête de Bonnet à la demande de Jamie afin qu’il puisse assouvir sa vengeance.  

Ils sont évoqués par Fergus et Marsali qui se désolent de leur absence, eux qui auraient tant besoin d’aide !  

lIs sont présents bien sûr par l’entremise de Brianna qui a tant de mal à pardonner à son père et qui se languit de sa mère. 

Ils sont là pour nous également, soulagés de les savoir réconciliés malgré leur peur de ne pas retrouver Roger. Leur éloignement symbolise finalement cette longue marche de 1000 kilomètres qui les séparent de Roger et leur volonté de ne pas abandonner.  

  

Nous les retrouvons finalement en introduction du dernier épisode de la saison : « un homme de valeur. » 

Ils ont enfin rejoint le village mohawk et ont l’assurance que Roger est bien en vie. 

Hélas, à la vue de la pierre de Dent de Loutre, les tentatives d'échange sont annulées et ils sont sommés de s’en retourner, sans Roger. Mais bien sûr, c’est inconcevable !  

Comme à son habitude, Claire affronte l’injonction avec courage et entêtement. Ses yeux rivés à ceux de Tehwahsehwkwe, elle refuse de reculer si près du but. Jamie, en bon écossais, accoutumé aux règles claniques, sait que cela ne sert à rien de discuter la parole du chef. Il faut s’éloigner pour mieux se regrouper et revenir à la charge.  

D’ailleurs c’est ce qu’il dit, à peine installé dans une clairière voisine. Il évoque tout d’abord Fort William lorsqu’il est venu sauver Claire des griffes de Black Jak Randall il y a des années de cela, puis comme pour clore un débat qui n’a pas lieu d’être : 

 « Je ne sais pas ce que cette pierre signifie pour les Mohawks, mais je ne retournerai pas auprès de Bree avec un caillou alors que Roger est encore ici ». 

  

Lorsque Wahkaiiosta les surprend avec quelques guerriers fidèles afin de récupérer l’opale, il est intéressant de constater qu’immédiatement Jamie se met en retrait. D’évidence, la pierre et tout ce qu’elle symbolise, fait référence à cette partie de la vie de Claire qui lui échappe. 

Durant un instant, l’existence de Roger, de Bree, de Fergus, de Claire et Jamie n’a plus d’importance. Ce qui prévaut, c’est le devenir des tribus iroquoises que Dent de Loutre a tenté de préserver. Portant à sa charge le poids du destin de son peuple tout comme Claire portait celui de la défaite écossaise, il a donné sa vie sans parvenir à ses fins. Son ultime pouvoir étant de défier la mort pour trouver Claire sous forme de fantôme et lui céder la pierre afin qu’elle relaye son message. 

  

La destinée de Dent de Loutre, la mémoire d’un peuple glorieux, la liberté de Roger. Tout finit par s’imbriquer finalement et l’espoir renait d’un côté comme de l’autre. 

Hélas, le plan échoue. Wahkaiiosta est chassée de son village et les Fraser sont à nouveau sommés de repartir, sans Roger. 

Alors Jamie n’hésite plus. C’est en lui, instinctif, ça coule dans son sang, c’est ainsi qu’il conçoit sa place auprès des siens : sa vie contre celle de ceux qu’il aime.   

Mais pour une fois, l’homme de grande valeur, ce ne sera pas Jamie. Car il y a Ian désormais. 

Lui aussi doit se faire pardonner. Si Roger est là, captif et blessé à mille kilomètres de sa femme et de son enfant, c’est parce qu’il l’a vendu aux Mohawks, et peu importe qu’il l’ait fait sous l’injonction de Jamie. Il va rester ici, prendre sa place, libérer toute la famille ! Il sera la solution, l’apaisement, la guérison. 

D’ailleurs cette haie guerrière qui s’organise presque immédiatement autour de lui et qui rappelle celle qui avait mis Roger à terre ne lui apparaît pas si terrifiante. Il la comprend, il l’affronte. En bon Fraser, il est prest.  

Son sourire lorsqu’il est accepté officiellement comme un membre de la tribu est, à mon sens, le plus beau moment de toute la saison. 

  

De leur côté, Claire et Jamie repartent avec Roger. 

Pour eux il y a encore beaucoup à faire. Tout d’abord recevoir la rage de Roger, mais surtout l’informer du viol de Brianna et de l’enfant à naitre. 

Tout à coup leur quête n’est plus « sauver Roger » ! Mais « épargner Brianna ». Cela ne s’est pas fait graduellement, mais tout d’un coup, comme si une porte venait de se refermer derrière eux. 

Nous ressentons le poids de la douleur impacter chacune de leurs paroles. Il y a à la fois urgence, mais également lourdeur, détresse, colère, regrets, doutes… 

  

Je me permets une petite critique personnelle à propos de la posture des Fraser que je trouve pour le moins sévère vis-à-vis de Roger. Nulle prise en compte de l’enfer qu’il a traversé. On lui balance une réalité en plein visage en lui intimant de prendre des décisions presque insoutenables. Même si Claire semble vouloir lui laisser un peu de temps et tente de s’adoucir parfois, elle reste loin de lui malgré tout sans s'occuper de son état de santé, ce qui ne lui ressemble pas.  

« Tu m’as couté un garçon que j’aime, et ma fille n’a pas besoin d’un lâche », lui dit Jamie. 

« S’il vous faut du temps, prenez-le », rajoute Claire afin d’apaiser les esprits « Car il s’agit de notre fille »… 

Et nous sentons là l’enjeu qui les déchire les uns et les autres. 

Le drame se nourrit du passé, du présent et de l’avenir, s’infiltrant au coeur même de la famille. 

  

Ce temps que prend Roger se déroulera en privé et nous ne connaitrons rien de son parcours jusqu’à son retour à River Run. 

On nous donne à voir l’arrivée de Claire et Jamie auprès de Brianna et de leur tristesse face à sa déception. Tout reste en suspens malgré le fait qu’ils l’ont retrouvé, malgré la naissance de l’enfant. Un enfant qui n’a toujours pas de nom, car rien de l’avenir n’est encore écrit.  Heureusement pour nous, l’attente ne durera pas. Roger revient et choisit sa femme et son fils. 

Quant à l’avenir finalement, il ne se jouera pas à ce niveau puisqu’un nouvel obstacle advient par l’entremise d’un message du gouverneur Tryon : 

Jamie Fraser doit tenir sa promesse faite à la couronne et doit dénicher puis exécuter le chef des régulateurs, Murtagh FitzGibbons.