Texte : Françoise Rochet
Illustration : Gratianne Garcia
Qui remercient toutes deux les Quakers de France ayant répondu à leurs questions.
« Les gouvernements, comme les horloges, partent du mouvement que les hommes leur donnent ; et comme les gouvernements sont faits et déplacés par les hommes, ils sont aussi ruinés par eux. C’est pourquoi les gouvernements dépendent davantage des hommes que des hommes dans les gouvernements. Que les hommes soient bons, et le gouvernement ne peut pas être mauvais; s’il est malade, ils le guériront. Mais, si les hommes sont mauvais, que le gouvernement ne soit jamais aussi bon, ils s’efforceront de le déformer et de le gâcher à son tour. »
William Penn
Préambule Cadre du gouvernement, 1682
L’Amérique a servi de terre de refuge à des groupes religieux minoritaires.
Elle est marquée par deux grandes utopies religieuses : les Puritains et les Quakers qui ont vu dans ce Nouveau Monde la chance de construire une société selon leurs croyances et leurs idéaux.
Mais si la démarche est identique, les utopies sont absolument différentes.
Nous avons vu que les Puritains ont édifié une « Nouvelle-Jérusalem » orthodoxe et intolérante en Nouvelle Angleterre.
Les Quakers, après des rejets et des errances vont enfin trouver une terre et à leur tour accueillir d’autres églises, croyances et sectes.
Jusqu’aux années 1680, l’Angleterre n’a pas de politique coloniale bien déterminée.
Elle octroie des chartes, des droits à des compagnies maritimes.
Mais elle offre aussi des droits à des particuliers : les colonies à propriétaires (proprietary colony). Le mécanisme est simple.
La Couronne octroie une charte et un territoire à un groupe de courtisans (ou une famille) pour services rendus à la Couronne.
En échange, les Seigneurs Propriétaires (Lords Proprietors) assurent le coût de la colonisation. Ils gouvernent, même si les colons restent sujets du monarque, et s’occupent de peupler leur territoire. La Couronne étend son influence au-delà des mers sans rien dépenser.
Le Propriétaire ne se rend généralement pas dans sa colonie.
William Penn, qui séjourne lui-même dans son domaine d’octobre 1682 à août 1684 offre un cas inhabituel.
Voici donc l’histoire de la Pennsylvanie.
C’est donc à William Penn, un Quaker, que la région doit sa prospérité dès 1682 lorsqu’il fonde le premier État quaker. Dès 1681, il élabore une constitution, le Frame of Government, qui assurera à la colonie une précieuse stabilité institutionnelle.
Homme singulier, destiné à une vie de courtisan à la cour des Stuart, il choisit de se convertir à une religion qui prône l’humilité et la simplicité.
Ce fils de l’amiral Penn, qui avait fait de la Jamaïque la plaque tournante de la traite des Noirs, avait reçu la région de Charles II en réparation d’une dette envers la famille Penn.
Il eut pour ambition de construire un Etat qui correspondrait à son idéal de Quaker, à savoir un état tolérant, non-violent et pacifiste.
Il décida d’attirer des immigrants de croyances et de nationalités diverses.
William Penn voulait rendre la Pennsylvanie plus humaine, en supprimant la peine de mort pour les vols et en garantissant la liberté de culte.
De plus, il voulait entretenir avec les Indiens des rapports justes et équilibrés. Il signa avec eux des accords qui furent scrupuleusement observés et qui maintinrent la paix dans la région.
La colonie, sans heurt, se développa rapidement et Philadelphie en fut le cœur ardent prospère grâce aux Quakers, des hommes aux manières graves et pondérées, avec leurs talents et leur philosophie pour mener à bien les entreprises commerciales.
La région était particulièrement prometteuse. Elle s’avéra riche en terre et pâturages. Rapidement, avec le savoir-faire des migrants, des Allemands, les exploitations agricoles constitueront l’épine dorsale de l’économie de l’État, produisant une grande variété de cultures. Les principaux produits de base sont les produits laitiers, le maïs, les bovins et les veaux, la volaille et les œufs, une variété multiple de fruits, le maïs doux, les pommes de terre, le sirop d’érable et plus tard… les arbres de Noël !
Philadelphie, c’est la « Cité de l’amour fraternel » du grec Φιλαδέλφια
Elle fut la première ville bâtie selon le « plan en damier », qui deviendra le modèle par excellence de l’urbanisme américain. Pour la première fois dans le Nouveau Monde, les rues furent désignées par des numéros, dès cette date, ce qui en fait la première réalisation moderne de la nomenclature urbaine alphanumérique.
Cette ville était la capitale dont la Constitution (Frame of Government, 1682) assurait la liberté de conscience et de culte de même que des droits politiques à quiconque croyait en un Dieu unique. Chaque coreligionnaire ne payait l’impôt que pour sa propre église.
En contre-partie, il y avait des devoirs et des interdictions : le repos dominical devait être respecté et le blasphème était passible de sanctions.
Cette ville, chef d’œuvre de son fondateur, sera jusqu’à la Guerre d’Indépendance le phare des Colonies avec Boston. À la veille de la Révolution, et ce dès 1760, Philadelphie sera la seconde plus importante ville du monde britannique après Londres.
Cette cité est considérée comme un Foyer de Lumières dans les Colonies.
Elle en fut même un centre de pensée révolutionnaire sous l’impulsion de Benjamin Franklin, né à Boston en 1706, et attiré par l’esprit de tolérance de la Pennsylvanie. Esprit tout à l’opposé de sa ville natale, intolérante et sectaire.
Son action est considérable… et nous en reparlerons lorsque nous aborderons la Guerre d’Indépendance.
Cependant retenons que sous son impulsion, la ville fut dotée d’une bibliothèque, la Library Company of Philadelphia, d’une Université, d’une société de Philosophie, d’une école de droit, de médecine et d’anatomie, d’un hôpital. Mais aussi d’une compagnie de pompiers, de banques et même d’une académie des Beaux-Arts.
Les idées se diffusèrent au XVIIIème siècle grâce à la presse.
Philadelphie devint le principal centre d’édition des Treize colonies : le premier journal, The American Weekly Mercury, parut en 1719. La Pennsylvania Gazette (1723) joua un grand rôle pendant la Révolution américaine.
En 1739 fut publié le premier traité contre l’esclavage et la ville devint, avec Boston, l’un des centres anti-esclavagistes du pays.
Philadelphie sera la capitale provisoire de la jeune république avant la création de Washington.
Qui sont ces Quakers ?
La Société religieuse des Amis ou Quakers (1662) est un mouvement
religieux fondé en Angleterre au XVIIème siècle par des dissidents de l'Église anglicane, dont un certain George Fox (1624-1691
Ils se nomment entre eux « Amis » et « Amies » en référence, à l’évangile de Jean :
“Vous, vous êtes mes amis si vous faites ce que, moi, je vous commande.” (Jean 15, 14).
La Société des Amis refuse de porter le titre d’église, dans un monde très hiérarchisé. Les Quakers sont peu nombreux (50 000 tout au plus au milieu du XVIIe siècle) et se distinguent par leur sobriété, leur pacifisme, leur égalitarisme (notamment entre hommes et femmes) et leur penchant pour le martyre. Ils tutoient leur prochain, n’ôtent jamais leur chapeau, ni pour saluer ni par déférence, et refusent de porter les armes comme de prêter serment.
• La Société des Amis se différencie de la plupart des autres groupes issus du Christianisme par l'absence de credo et de toute structure hiérarchique. Pour les Quakers, la croyance religieuse appartient à la sphère personnelle et chacun est libre de ses convictions.
Le concept de « lumière intérieure » (inner light) est cependant partagé par tous.
• Cette Lumière personnelle est donc une ouverture sur le monde et offre un esprit de tolérance envers les autres. Les Quakers mettent l’accent sur l’honnêteté, la simplicité et la sobriété.
• Les Quakers sont, à la fin du XVIIIe siècle, les premiers qui aient mené une action coordonnée et systématique contre la traite négrière. Leur communauté de Pennsylvanie décide, en 1774, d'exclure de son sein tous ceux qui pratiquent la traite. Ils seront les porte-parole de l’abolitionnisme.
• Persuadés que la guerre est un affront à la volonté de Dieu, les Quakers sont toujours pacifistes.
• Ils font de l’aide aux plus démunis une autre priorité.
• Ils se sont surtout attachés à venir en aide aux victimes des guerres.
• S’ils sont pacifistes, il n’en demeura pas moins qu’on les retrouva sur les champs de bataille comme médecins, infirmiers, secouristes, intendants.
• Ils vinrent en aide aux victimes du Nazisme et à toutes les personnes persécutées.
En 1947, les Quakers reçurent le prix Nobel de la Paix.
Quant au sobriquet « Quaker » pourrait venir de « trembler » (to quake) devant le nom de Dieu.
Cette colonie a accueilli des peuples divers dès le XVIIème siècle : outre des Suédois (L’éphémère Nouvelle-Suède - Nya Sverige) déjà installés dans la région, elle accueillit des mennonites ou anabaptistes allemands, des frères moraves, des amish alsaciens, des presbytériens écossais, des baptistes irlandais, gallois et des luthériens allemands, des réformés, des catholiques, des Herrnhutters ou Frères moraves, des piétistes, des baptistes du septième jour, des dunkers, des presbytériens, des francs-maçons, des séparatistes, des libres-penseurs, des juifs, des mahométans et des païens.
Un tel degré de pluralisme religieux était rare au XVIIIe siècle et c’est dans c’est ce climat de tolérance religieuse qui encouragea l'économie et le commerce.
L’éphémère Nouvelle-Suède - Nya Sverige
Les Suédois fondent en 1638 Fort Christina sur les bords du fleuve Delaware près de l’actuelle Wilmington.
Cette petite colonie va vivre durant vingt ans et douze expéditions partiront de Suède avec des colons et des marchandises pour la colonie.
Cette colonie s’installe le long de la rive occidentale du fleuve avec « l’achat » de terres aux Susquehannocks ou Minquas, et aux Lenapes, deux groupes avec lesquels les Scandinaves entretiennent de bonnes relations sans véritable conflit armé.
La colonie ne parvient cependant jamais réellement à se développer.
La Nouvelle-Suède est finalement conquise en 1655 par les Néerlandais.
Au moment de la conquête néerlandaise, la Nouvelle-Suède a une population d’environ 600 colons et de quarante soldats. Un siècle plus tard, cependant, un millier de colons de Pennsylvanie et du Delaware, descendants de cette petite population, parleront encore le suédois.
Delaware (1638) Fondée par les Suédois sous le nom de Nouvelle-Suède.
Conquise par les Hollandais en 1655 et absorbée dans la Nouvelle-Néerlande. Conquise par les Anglais en 1664 (avec la Nouvelle-Néerlande).
Incluse dans la charte de Pennsylvanie de 1682.
Détachée de la Pennsylvanie en 1704.
Quelques personnalités quakers
Albert Baez (1912-2007) est un physicien mexicano-américain. Il est connu pour ses contributions significatives aux premiers développements des microscopes à rayons X ainsi que des télescopes à rayons X.
Il est le père des chanteuses Joan Baez et Mimi Fariña.
Lors des années 1950, au début de la Guerre froide, ses capacités sont sollicitées pour la course aux armements. De nature pacifique, il refuse plusieurs offres de l'industrie de l'armement, préférant consacrer sa carrière à l'éducation et aux causes humanitaires.
Joan Baez (1941-)
Au-delà sa carrière musicale, elle est fidèle aux engagements de son père.
Sa vie est faite de combats pour les causes humanitaires, les droits de l’homme.
Pacifique dans l’âme, elle devient l’égérie contre la guerre au Vietnam….
Elle milite aussi pour l’abolition de la peine de mort :
James Dean, l’inoubliable acteur de la Fureur de vivre.
Dans cet extrait, nous le voyons pacifiste et ne répondant pas aux provocations.
Richard Nixon, le président destitué… qui s’était engagé vis-à-vis du Vietnam…
Annonce de la fin de la guerre au Viêt Nam. « We have today concluded an agreement to end the warand bring peace with honor in Vietnam and in Southeast Asia » lors de la conférence de Paris, le 23 janvier 1973.
Quaker Oats, une entreprise quaker ?
Contrairement à ce que laisse penser son célèbre logo, la marque Quaker Oats n’appartient pas à des Quakers et n’a pas non plus été créée par des Quakers.
Connue dans le monde entier pour ses céréales de petit déjeuner, elle fut créée au XIXe siècle par deux Américains voulant capitaliser sur l’image d’intégrité véhiculée par le mouvement.
Et maintenant retrouvons les livres de Madame Diana Gabaldon !
Les Quakers
Une fois les Fraser installés à Fraser’s Ridge, ils ont été en contact avec des Quakers présents en Caroline du Nord Dans le T5 :
• Hermon Husband est un ancien quaker : Claire et Jamie le rencontrent pour la 1ère fois au mariage de Jocasta. Il vit à moins de deux jours de cheval de Fraser’s Ridge, il est un chef régulateur, imprime et distribue des pamphlets séditieux à travers la Caroline du Nord. Il a été expulsé de son groupe local de quakers, les « amis » apprécient peu ses activités qu’ils considèrent comme une incitation à la violence. Husband lors d’une visite au Ridge, donne des explications à Jamie sur l’origine de la « Société des Amis » avec Georges Fox fondateur du mouvement en Angleterre et James Nayler membre profondément dévoué.(CH19)
• Il y des quakers parmi les nombreux patients de Claire :
* Les Hansen, une famille quaker particulièrement nombreuse n’habite pas loin du Ridge
* À Woolam’s Creek, situé au pied de Fraser’s Ridge, la famille Woolam possède le moulin et une partie des terres sur l’autre rive du torrent. Ian passe du temps à Woolam’s Creek attiré par les filles et Jamie le préfère avec ces filles vertueuses plutôt qu’avec les jeunes indiennes aux regard lascifs.
Dans le T7 :
• L’assemblée annuelle des Quakers à Philadelphie a décidé qu’ils étaient pour la mère patrie, (loyalistes) le docteur Denzell (Denny) Hunter et sa sœur Rachel racontent à William qu’ils sont pour l’indépendance « la liberté, celle de l’individu comme celle du pays est un don de Dieu ». Le dr Hunter va rejoindre l’armée continentale en tant que médecin et sera exclu avec sa sœur de la communauté des « amis ».
• Le docteur Hunter et Rachel soignent William dans la maison d’une famille quaker à Oak Grove, Rachel lui explique ce que sont les Quakers ( CH39)
Dans le T8 :
• Claire est avec le docteur Hunter et sa sœur Rachel pour soigner les blessés de l’armée continentale : au Fort de Ticonderoga, à la Bataille de Saratoga et à Valley Forge près de Philadelphie où l’armée des Continentaux a pris ses quartiers d’hiver et à la bataille de Monmouth.
• Mariage Quaker de Dottie / Denny et de Ian / Rachel dans une église méthodiste à Philadelphie.
• Claire, Jamie et Ian sont proches des Hunter et comprennent leur philosophie.
• Dans une petite ferme quaker, après y avoir rencontré le général Washington le colonel Fraser est promu général de l’armée continentale. Sylvia Hardman, quaker avec ses filles Prudence et Chasteté soignent pendant deux jours Jamie immobilisé avec un dos coincé.
Pennsylvanie Philadelphie
Claire, Jamie, le clan Fraser et la famille Grey ont passé quelque temps à Philadelphie en Pennsylvanie.
• Claire et Jamie parce qu’ils veulent aller en Écosse pour ramener Ian à sa mère et pour ramener la presse de Jamie en Amérique et leur recherche de bateau les a amenés à passer par là, également pour se rapprocher de Fergus et Marsali qui y vivent.
• Ian parce qu’il suit Jamie
• Fergus et Marsali : se sont installés imprimeurs à Philadelphie avec l’aide financière de Jamie dans une belle maison en briques en pensant qu’ils seraient mieux en sécurité dans une ville où l’opinion publique se rapproche de leurs convictions. ( CH 87).
• Lord John Grey, est agent secret et ambassadeur pour l’armée Britannique, son frère le colonel Harold Grey Duc de Pardloe (Hal) commande un régiment et William Capitaine dans l’armée royale y est cantonné en temps que prisonnier de guerre.
Bibliographie
• Brodin, Pierre, Les Quakers en Amérique du Nord au XVIIe siècle et au début du XVIIIe, Paris, Dervy-Livres, 1985 [1935].
• Dommen Edouard, Les Quakers , Paris, Editions du Cerf, 1990
• Louis, Jeanne-Henriette et Héron, Jean-Olivier, William Penn et les quakers. Ils inventèrent le Nouveau Monde, Paris, Gallimard, « Découvertes », 1990.
• Van Ruymbeke, Bertrand,L’Amérique avant les États-Unis. Une Histoire de l’Amérique anglaise, 1497-1776, Paris, Flammarion, collection « Au fil de l’histoire », 2013
• Van Etten Henry, George fox et les Quakers, Paris, Editions du Seuil, 1953.
« J'ai demandé ce soir un temps de passage à la radio et à la télévision pour annoncer qu'aujourd'hui, nous avons conclu un accord pour mettre fin à la guerre et faire la paix avec honneur au Vietnam et en Asie du Sud-Est. En ce moment, la déclaration suivante est publiée à Washington et à Hanoï : ''Aujourd'hui, 27 janvier 1973, à 12 heures 30, heure de Paris, l'accord mettant fin à la guerre et rétablissant la paix au Vietnam est signé par le Docteur Henry Kissinger au nom des États-Unis, et par le conseiller spécial Lê Duc To, au nom de la République démocratique du Vietnam. Cet accord sera officiellement signé par les parties ayant participé à la Conférence de Paris, le 27 janvier 1973, au centre international de conférences de Paris. Le cessez-le-feu prendra effet à zéro heure GMT le 27 janvier 1973.'' »