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Pour rappel, la correction se fera ainsi 

En noir : le texte tel qu'il est dans la version française et validé par la traductrice

En Bleu : le texte tiré de la version originale, absent dans la version française d'origine et enfin traduit.

En blanc et rayé, le texte ajouté dans la version française d'origine ne figurant pas dans la version originale.

Correctif

Tome 2  Chapitre 33

Outlander, tome 2, Le Talisman, chapitre 33, ©Diana Gabaldon 

 Description : Jamie et Ian sont partis ensemble à Broch Mordha pendant que Claire est restée à Lallybroch avec Jenny… 

 Traduit par Lucie Bidouille 

 Corrigé par Anne Montégu-Terrière 

 

33. Tu es le gardien de ton frère 

 

 […]

 

Nous discutâmes ainsi toute la matinée, à raccommoder de vieux vêtements ou à des-siner un patron pour faire une robe à Maggie.

 – Il y a de l'humidité dans l'air, déclara Jenny en lançant un regard vers la fenêtre. Tu as vu la brume au-dessus du loch, ce matin ? À mon avis, il ne va pas tarder à neiger.

 – J'espère que non ! Ian et Jamie risquent d'avoir du mal à rentrer.

 À   vol d'oiseau, le village de Broch Mordha n'était qu'à une douzaine de kilomètres de Lallybroch. Mais pour y accéder, il fallait franchir plusieurs cols escarpés sur un chemin à peine tracé.

 Il commença à neiger dans l'après-midi, et il neigeait encore à la nuit tombée.

 – Ils seront restés à Broch Mordha, me rassura Jenny. Ne t'inquiète pas pour eux. Ils sont sûrement installés bien au chaud dans un cottage. 

 «   Ils seront restés à Broch Mordha », dit Jenny après une inspection du ciel nuageux, dont les lueurs crépusculaires rosissaient la neige. « Ne t'inquiète pas pour eux. Ils sont sûrement installés bien au chaud dans une auberge. » Elle m'adressa un sourire rassurant tout en tirant les volets. Soudain, des pleurs nous parvînmes depuis le fond du couloir, et elle rassembla les jupons de sa tenue de nuit avec une exclamation étouffée. 

 «   Bonne nuit, Claire» lança-t-elle en se hâtant déjà vers sa mission de sauvetage maternel. « Dors bien. » 

 En général, je dormais bien ; malgré le climat froid et humide, la maison était solidement bâtie, et le lit en plume d'oie était abondamment fourni en couvertures. Ce soir, cependant, Jamie n’était pas là. Le lit me semblait vaste et moite, mes jambes tremblaient et mes pieds étaient gelés. 

 Je tentai de m'allonger sur le dos, les mains légèrement serrées contre mes côtes, les yeux fermés, respirant profondément, et j’invoquai une image de Jamie ; si je pouvais l'imaginer là, assoupi dans le noir à côté de moi, peut-être pourrais-je m'endormir. 

Le bruit d'un coq chantant à pleine puissance me fit sursauter, comme si un bâton de dynamite avait explosé sous le lit. 

 «   Idiot ! » m’exclamai-je, chaque nerf de mon corps encore tendu par le choc. Je me levai et ouvrai le volet. Il avait cessé de neiger, mais le ciel était encore pâle et nuageux, d'une couleur uniforme d'un bout d'horizon à l'autre. Le coq poussa un autre cocorico retentissant depuis le poulailler en-dessous de ma fenêtre. 

 «   La ferme! » lançai-je. « C’est le milieu de la nuit, espèce de petit bâtard à plumes ! » L’équivalent aviaire d’un beuglement résonna dans la nuit calme, et au bout du couloir, un enfant se mit à pleurer, immédiatement suivi d’un juron étouffé en gaélique provenant de Jenny. 

 «   Alors toi, » dis-je au coq qui demeurait invisible, « ton temps est compté ». Je n’obtins aucune réponse, et après avoir attendu un moment afin d’être certaine que le coq avait commencé sa nuit, je fermai les volets et fît de même. 

 L'agitation avait éliminé toute pensée cohérente. Au lieu de tenter d’en reprendre le fil, je décidai d'essayer de me réfugier en moi-même, dans l'espoir que la contemplation corporelle me détendrait suffisamment pour m’endormir. 

 Cela fonctionna. Alors que je commençais à somnoler, mon esprit concentré quelque part autour de mon pancréas, je pus faiblement entendre les sons du petit Jamie qui remontait le couloir vers la chambre de sa mère. Réveillé par une vessie pleine, il n’avait que rarement la présence d'esprit nécessaire pour se débrouiller seul, et à la place il descendait fréquemment l'escalier de la nurserie à la recherche d'un peu d’aide. 

 Je m'étais demandé, en venant à Lallybroch, si je pourrais éprouver des difficultés à côtoyer Jenny ; si je serais envieuse au sujet de sa fécondité si aisée. Et j'aurais pu l'être, si je n'avais pas observé que la maternité prolifique avait aussi ses revers. 

 «   Il y a un pot juste à côté de ton lit, andouille. » La voix exaspérée de Jenny me parvint alors qu’elle passait devant ma porte afin de ramener le petit Jamie dans son lit. 

 «   Tu as dû le heurter en sortant ; pourquoi ne penses-tu pas à utiliser celui-là, hein ? Pourquoi es-tu obligé de venir utiliser le mien chaque jour que Dieu fait ? » Sa voix s’éteignit à mesure qu’elle remontait l’escalier, et je souris, ma visualisation interne se poursuivant le long de la courbe de mes intestins. 

 Il y avait une autre chose qui faisait que je n'enviais pas Jenny. J'avais d'abord craint que la naissance de Faith ait pu me causer des dommages internes, mais cette crainte avait disparu grâce aux bons soins de Maître Raymond. En faisant l'inventaire de mon corps et en sentant ma colonne vertébrale se détendre au fur et à mesure que le sommeil me submergeait, je devinais que tout allait bien. Cela s'était produit une fois, cela pourrait se reproduire. Il ne manquait plus que le temps. Et Jamie. 

 Les pas précipités de Jenny résonnèrent à nouveau sur le parquet du couloir, en réponse à un cri endormi de Maggie au fond de la maison. 

 «   Les enfants sont une joie certaine, mais il faut la mériter », murmurai-je pour moi-même, et je m’endormis. 

 

Le lendemain, nous passâmes notre temps à faire nos corvées et à effectuer notre routine quotidienne, avec une oreille à l’affut du moindre bruit de chevaux dans la cour. 

 «   Ils seront restés pour traiter des affaires », déclara Jenny, apparemment confiante. Mais je la voyais faire une pause à chaque fois qu'elle passait devant la fenêtre qui donnait sur l’allée menant à la maison. 

 Quant à moi, j’eus beaucoup de mal à ne pas imaginer le pire. La lettre confirmant le pardon de Jamie, signée par le roi George, était enfermée dans le tiroir du bureau du Laird. Jamie la considérait comme une humiliation et l'aurait volontiers jetée au feu, mais j'avais insisté pour qu'elle soit conservée, au cas où. Maintenant, en écoutant les bruits du vent hivernal, je continuai à avoir des visions comme si tout cela n’avait été qu’une erreur ou une sorte de canular; des images de Jamie, une fois de plus arrêté par les tuniques rouges, à nouveau conduit dans la misère de la prison avec le danger imminent que représentait le nœud coulant du bourreau. 

 Les hommes rentrèrent juste avant la tombée de la nuit, les chevaux chargés de sacs 

contenant du sel, des aiguilles, des épices à marinade et d'autres petits articles que Lallybroch ne pouvait produire. 

 J’entendis l’un des chevaux hennir en entrant dans la cour devant l'écurie et je me dépêchai de descendre, rejoignant Jenny qui sortait des cuisines. 

 Le soulagement me gagna lorsque je vis la grande silhouette de Jamie dans l'ombre de la grange. Je me précipitais dans la cour, sans tenir compte de la légère couche de neige qui recouvrait le sol, et me jetai dans ses bras. 

 « Où diable étais-tu passé ? » lui demandai-je. 

 Il prit le temps de m'embrasser avant de me répondre. Son visage était froid contre le mien, et ses lèvres avaient un léger goût de whisky. 

 «Miam, des saucisses pour le dîner ?» demanda-t-il d'un ton approbateur, en reniflant mes cheveux chargés d'odeurs de cuisine. « Bien, je meurs de faim.» 

 Ils ne rentrèrent que le lendemain soir, juste avant la nuit, leurs montures chargées de sacoches remplies de sel, d'aiguilles, d'épices et d'autres petits articles que Lallybroch ne pouvait produire. J'entendis leurs chevaux hennir quand ils entrèrent dans la cour de l'écurie et dévalai l'escalier, manquant renverser Jenny au passage. Je traversai la cour à grandes enjambées, trempant mes souliers dans la neige fraîche, et me jetai dans les bras de Jamie. 

 – Où étais-tu passé ? le houspillai-je aussitôt. 

 Il prit le temps de m'embrasser avant de répondre, humant l'air qui venait des cui-sines : 

 – Hmm, ça sent bon ! Qu'est-ce qu'il y a à dîner  ? Je meurs de faim. 

 – Poulet-purée, répondis-je succinctement. Alors, où étiez-vous ?

 Il se mit à rire, en secouant son plaid couvert de neige.

 – Purée  ? Ça se mange  ?

 – Ce sont des pommes de terre écrasées dans du lait, un plat qui n'a pas encore péné-tré les profondeurs des Highlands. Maintenant, tu vas me répondre ? Jenny et moi étions mortes d'inquiétude !

 – Eh bien... nous avons eu un petit accident... commença Jamie.

 

[…]