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Saison 7, épisode 2

L’endroit le plus heureux du monde

Par Valérie Gay-Corajoud

Le passé 

 

L’épisode précédent s'étant terminé avec le sacrifice de Tom Christie, prenant à sa charge le meurtre de Malva puis la mort de Richard Brown, je pensais tous les drames passés définitivement clos. Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir la présence d’Allan dès l’ouverture de ce nouvel opus.

Puis, je me suis souvenu qu’il était le dernier de la famille Christie, et qu'il lui fallait bien une fin, à lui aussi. Il est vrai également que, dans le livre, ce passage se situe à la toute fin. Mais j’ai trouvé cela intéressant qu’ils nous l’aient présenté en introduction.

 

Je suis, d’ordinaire, assez fan de Alexander Vlahos, mais j’avoue n’avoir pas été convaincue par son interprétation d’Allan lors de la saison 6. À sa décharge, les scénaristes lui ont octroyé peu de temps pour installer son personnage, préférant laisser plus de place à Tom et à Malva.

Aussi, ai-je été agréablement surprise de le retrouver si juste durant cette scène d’ouverture.  Il nous offre un jeune homme littéralement détruit, empli d’une douleur d’autant plus grande qu’il en est responsable. La mort de Malva, c’est comme un monstre qu’il doit combattre alors que plus rien ne le retient à la vie.

 

J'ai du mal à déterminer ce que je ressent à son propos. De la haine pour avoir tué sa sœur et le bébé qu’elle portait ? De la colère, pour avoir laissé accuser Claire en la sachant innocente ? Pire même, de la détester de s’être fait aimer par Malva ? Ou alors, de la pitié en constatant son désarroi ? 

Ce qui est certain, c’est qu’Allan est inapte à accepter la réalité. Le flash-back sur sa relation sexuelle avec sa sœur nous montre clairement que cette dernière n’y prenait aucun plaisir et ne semblait pas partager ses sentiments. Ce qu’elle confirme d’ailleurs dans le deuxième flash-back, juste avant que son frère ne l’égorge. Ce n'est pas lui qu'elle aime, mais Claire à qui elle veut révéler la vérité.

Y a-t-il plus forte douleur pour un cœur éperdu d’amour de ne pas être aimé en retour ?  

Le pistolet posé à côté de lui ne laisse aucun doute sur ce sujet. Il compte en finir avec la vie.

Mais Claire ne l’entend pas de cette oreille et tente de l’en empêcher.

 

 Vous ne pouvez pas vous tuer. Je vous l'interdis, vous m'entendez ? 

     Il se tourna vers moi, le visage déformé par l'angoisse. 

– De quel droit ? Je ne peux pas vivre. Je ne peux pas ! 

     – Il le faut ! 

     Je me redressai sur mes pieds, étourdie, ne sachant pas si mes jambes allaient me soutenir. 

     – Il le faut ! 

     Il releva vers moi ses yeux baignés de larmes, incapable de parler. J'entendis un léger sifflement, comme un moustique, suivi d'un bruit sourd. Il ne changea pas d'expression, mais son regard mourut doucement. Il resta à genoux quelques instants, puis se pencha en avant telle une fleur au bout de sa tige, et j'aperçus la flèche plantée au milieu de son dos. Il toussa, crachant du sang, puis s'effondra sur le côté, recroquevillé contre la tombe de sa sœur. Ses jambes s'agitèrent dans un spasme, comme une grenouille grotesque. Puis il cessa de bouger. 

     Je restai plantée là, hébétée, ne prenant que peu à peu conscience de la présence de Ian, qui avait émergé entre les arbres, son arc en bandoulière. Rollo renifla le corps avec curiosité en couinant. 

     – Il a raison, ma tante, dit-il calmement. Il ne peut pas. 

 

La neige et la cendre, chapitre 122 : Le gardien.

 

 

Il ne peut pas avait dit Ian. Pourquoi ? Parce qu’il doit payer pour ses péchés ? Ou parce qu’on ne peut vivre avec de telles souffrances ? Après tout, Ian sait ce que c’est de vivre sans la femme adorée.

Dans la série, il affirme avoir cru tout du long que l’enfant était de lui. Ce qu’il ne dit pas, c’est s’il l’espérait, ou s’il le redoutait.

 

Il leur faut maintenant enterrer le corps. Il manquerait plus que Claire soit accusée du meurtre d’un autre Christie !

Cette partie n’est pas décrite dans le livre, mais je l’ai trouvé intéressant, d'autantque cela permet l'intervention de Mme Bug dont le personnage a été jusque-là plutôt discret alors que son rôle est important.

Passé un moment de doute, elle se propose de les aider à creuser la tombe et cela fait du bien de constater que les Fraser ont encore des amis sur qui compter au Ridge.

 

Générique.

 

Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais, déjà que je n’aime pas, mais alors, pas du tout, cette nouvelle version du générique chanté par Sinead O’connor, mais ce qui m’exaspère le plus, c'est sa voix sans matière s’étalant durant la « vignette » du titre que nous sommes obligés de supporter.

Bon, je ne reviendrai plus là-dessus, mais j’avais besoin que ça sorte.

 

 

Le présent 

 

Nous assistons à l’accouchement de Brianna.

À l’inverse de la naissance de Jemmy qu’elle a dû vivre sans ses parents (en tous les cas dans la version télévisée), toute la famille est là pour la venue au monde de Mandy. Claire, active comme à son habitude, Roger et Jamie, silencieux et en arrière alors qu'à cette époque, il était d'usage que les hommes attendent à l'extérieur.

 

Je me suis dit, en voyant cette petite bouille adorable dans les bras de sa grand-mère, que Mandy était bien la seule capable de lui faire oublier la mort du bébé de Malva. Une vie pour une mort. Un bonheur sans nom pour un drame indicible.

 

Les grands-parents s’éclipsent pour laisser Bree et Roger profiter de ce précieux moment avec leur petite fille.

Je trouve ça bien, et cela me ramène à  chacune des naissances de mes 4 enfants, allongée les jambes en l’air et en pleine lumièe pour le confort des médecins, entourée d’un personnel médical bruyant aux gestes techniques qui m’ont retiré mes bébés aussitôt  nés  pour les laver, les peser, les mesurer… Et je me dis, encore une fois, que "progrès" ne rime pas forcément avec "humanité".

 

Je note une légère différence entre la VF et la VO.

En version française, Roger accueille sa fille en disant : « Ma toute petite » alors que la version originale respecte le surnom que Roger et Bree avaient donné à leur enfant du temps où elle n'était qu'un foetus dans le ventre de sa mère. « Ma petite Otto ». Voilà, c’est tout bête, mais c’est le genre de détail qui fait que les lecteurs éprouvent des sentiments encore plus intenses, car cela les replonge dans les délices de la lecture.

  

S’ensuivent alors, deux moments qui se ressemblent et j’avoue qu'à la première vision, je les pensais redondants.

Tout d’abord Jamie avec sa petite-fille, fier et heureux de lui imaginer un futur, la présentant aux chevaux et convenant avec elle de son futur talent de cavalière.

Puis, à peu près la même scène avec Claire dans son office, Mandy dans ses bras, lui montrant son matériel et rêvant pour elle d’un avenir en tant que médecin… 

Mais ces courts moments de bonheur seront les derniers. Claire remarque ce que personne d’autre ne peut reconnaître : les signes d’un problème cardiaque que son stéthoscope en bois (une merveille) lui confirme. : Mandy souffre d’une persistance du canal artériel.

 

Tout dans la scène suivante est sublimement interprété et je mets au défi n’importe qui de la découvrir sans pleurer.

 

Il y a ce qui est dit, qui est poignant, et il y a ce qui n’est pas dit, et qui l’est plus encore. La peur, la responsabilité, l’espoir ! et par-dessus tout cela, la douleur.

 

Ce que Claire est obligée d'annoncer à sa fille, c’est terrible. C’est déjà difficile pour un médecin de signaler ce genre de nouvelle à ses patients, mais comment cela peut-il  être supportable lorsqu’on doit le faire pour sa fille ?

Cette responsabilité de la santé de chacun, notamment de sa famille, c’est la croix que porte Claire depuis sa traversée des pierres. Nous l’avions déjà constaté quand elle pensait devoir couper la jambe de Jamie après la morsure du serpent.  Mais au moins pouvait-elle agir !

Ici, elle ne peut rien faire. Elle goûte à l'expérience de ce que supportent tous les autres face à la maladie : l’impuissance.

 

J’ai aimé cet instant intime où, tous autour de Mandy, écoutent Claire avec attention.

D’une certaine manière, les explications scientifiques de Claire permettent de reprendre son souffle. C’est une technique bien connue des médecins : scientiser (oui, j’invente des mots parfois) la maladie pour se prémunir des réactions trop affectives. 

J’ai trouvé aussi très justes les réflexions des parents qui se demandent s’ils ont fauté quelque part. « J’ai vu qu’elle tétait moins que Jemmy », dit Bree. « J’ai entendu sa respiration sifflante » continue Roger.

Immédiatement Claire, met un terme à cette autoflagellation.

« Vous êtes parents, pas médecins ». 

  

Le dialogue entre Claire et Bree est poignant et bravo aux deux actrices qui ont su si bien retranscrire ce moment.

Plus l’annonce de Claire est sans appel, et plus Bree sert contre elle son bébé, comme si elle pouvait la remettre dans son ventre et oublier ce qu’elle venait d’entendre.

Quant à Claire, déchirée entre son désir de préserver sa fille et son incapacité à lui cacher la vérité, elle doit assumer le fait que chaque mot qu’elle prononcera la blessera, l’accablera, lui fera subir la pire douleur qui soit pour un parent.

 

Bon, dit Brianna calmement. Que faut-il faire ? 

     – Je ne sais pas. 

     En vérité, dans la plupart des cas, c'était la réponse habituelle, toujours insatisfaisante, surtout à cet instant. 

     – Parfois, il n'y a aucun symptôme, ou juste de très légers signes. Si l'ouverture du canal est très grande et que l'enfant présente des symptômes pulmonaires, ce qui est son cas, alors... elle peut peut-être se développer de façon convenable, mais elle ne s'épanouira pas en raison de ses problèmes d'oxygénation. Ou... 

     Je pris une grande inspiration, rassemblant mon courage 

– ... elle pourrait développer une insuffisance cardiaque. Ou une hypertension pulmonaire... c'est quand la pression s'accumule dans les pou... 

     – Je sais ce que c'est, m'interrompit Brianna d'une voix tendue. Ou ? 

     – Ou une endocardite infectieuse. Ou... pas. 

     – Elle mourra ? 

     Elle me fixait droit dans les yeux, les mâchoires crispées, mais à la manière dont elle serrait Amanda contre elle, je savais qu'elle attendait une réponse. Je ne pouvais pas lui cacher la vérité. 

     – Probablement. 

     Le mot resta suspendu en l'air entre nous, hideux. 

     – Je ne peux pas l'affirmer à coup sûr, mais... 

     – Probablement, répéta-t-elle. 

     Je détournai les yeux, incapable de soutenir son regard. Sans un équipement moderne tel qu'un échocardiogramme, il m'était impossible de mesurer l'étendue exacte du problème. 

     Mais, outre ce que mes yeux et mes oreilles me disaient, il y avait ce que j'avais ressenti dans ma chair... cette sensation que quelque chose ne tournait pas rond, cette conviction atroce qui prend parfois... et ne ment pas. 

     – Tu peux la sauver ? 

     J'entendis le tremblement dans sa voix et l'entourai dans mes bras. Elle avait la tête penchée sur Amanda, et je vis ses larmes tomber, une à une, sur les fines boucles brunes au sommet du crâne de l'enfant. 

     – Non, murmurai-je. 

     Le désespoir m'envahit, et je les étreignis toutes les deux comme si je pouvais arrêter le temps et le sang. 

     – Non, je ne peux pas 

  

La cendre et la neige, chapitre 114 : Amanda.

 

Le chapitre se termine sur cette terrible affirmation.

Dans la série, ils ont eu la bonne idée de la faire suivre immédiatement par :

« Mais je connais quelqu’un ». 

 

Personne n’a besoin de demander qui ? La vraie question aurait été : quand ? Mais ils le savent déjà tous.

 

L’avenir 

  

Il y a tant d’écueils à affronter avant même de traverser les pierres, puisque c’est de ça que nous parlons.

La dernière fois qu’ils ont essayé, ils ont échoué. Il faut dire qu’à cette époque, leur motivation n’était pas la même !

Ensuite qu'en sera-t-il de Mandy ? Sera-t-elle capable ? Elle est bien trop petite pour dire si oui ou non elle les entend les pierres chanter. Elle semble en effet intéressée par celle que lui montre Jamie, mais est-ce suffisant ? Et si tout le monde passait sans elle ? L’idée est tout simplement terrifiante.

C’est là que, pour la première fois, la série évoque le fait que Jemmy et Mandy, en plus d’être des voyageurs du temps, possèdent un don supplémentaire.

 

…  

Écoute... tu entends un bruit quand tu te concentres sur cette pierre ? 

     Il lui montra la bague de Jamie posée sur la table. Le visage de l'enfant s'illumina. 

     – Bien sûr. 

     – Quoi, de là où tu es ? s'étonna Brianna. 

     Jemmy regarda le cercle de ses parents et grands-parents, surpris par leur intérêt. 

     – Bien sûr, répéta-t-il. Elle chante. 

     Le cœur battant, craignant autant un oui qu'un non comme réponse à sa question, Jamie demanda : 

     – Tu penses que Mandy l'entend chanter, elle aussi ? Jemmy saisit la bague et se pencha sur le couffin, la tenant droit au-dessus de la tête de sa petite sœur. Elle battit des pieds avec énergie et émit toutes sortes de bruits, mais impossible de savoir si c'était à cause de la pierre ou de la vue de son frère. Celui-ci sourit. 

     – Elle peut l'entendre, annonça-t-il. 

     – Comment le sais-tu ? questionna Claire, intriguée. Surpris, Jemmy la dévisagea. 

     – Ben... parce qu'elle l'a dit ! 

  

Rien n'était fixé. En même temps, tout était dit. Je ne doutais pas de ce que mes doigts et mes oreilles m'indiquaient, l'état d'Amanda s'aggravait lentement. Très lentement... Cela prendrait peut-être une année, deux, avant que les troubles graves apparaissent..., mais ils apparaîtraient. 

     Jemmy avait peut-être raison, peut-être pas. Toutefois, nous devions partir du principe qu'il avait vu juste. 

     Il y eut des disputes, des discussions, beaucoup de larmes. Restait encore à savoir qui entreprendrait le voyage à travers les pierres. Brianna et Amanda devaient partir, c'était certain. Mais Roger devait-il les accompagner ? Et Jemmy ? 

     – Je ne te laisserai pas partir sans moi, déclara Roger entre ses dents. 

     – Je ne veux pas partir sans toi ! s'écria Brianna, exaspérée. Mais comment pouvons-nous abandonner Jemmy ici ? Et comment pouvons-nous l'emmener ? Un bébé encore... d'après les légendes, c'est possible, mais Jemmy... comment s'en sortira-t-il ? On ne peut pas risquer de le tuer ! 

     Je regardai sur la table le rubis et ma bourse qui contenait le saphir. 

     – Je crois qu'il nous faut trouver deux autres pierres. Juste au cas où.  

     C'est ainsi qu'à la fin de juin, nous descendîmes tous de notre montagne, le cœur en émoi. 

 

La neige et la cendre, Chapitre 114, Amanda

 

 

L’action 

 

L’action permet souvent de sortir de la stupéfaction. Agir, c’est reprendre la main sur ce qui nous échappait, c’est occuper son cerveau afin de ne pas devenir fou. Le temps redémarre, nous interdisant de nous figer sur cet instant précis qui a dévasté notre vie.

 

Contrairement à mes habitudes, je vais faire un lien avec ce que j’ai vécu moi-même lorsque j’ai compris que mon quatrième enfant était autiste. Durant des heures, des jours, je suis restée sidérée, comme foudroyée par ce que la vie venait de nous infliger.

Mais j’avais d’autres enfants, inquiets eux aussi, et surtout, ce petit dernier si fragile, qui avait besoin de moi. C’est cela qui m’a donné la force de tout surmonter. Ce sentiment que si je ne bougeais pas, tous allaient souffrir. J’avais ce pouvoir, sans même parler de devoir, de tout faire pour que tout aille bien. Alors je me suis remise en mouvement, et immédiatement, je me suis sentie mieux.

 

C’est ce que j’ai ressenti en lisant le livre de Diana ainsi qu'en visionnant cet épisode. 

Cette action familiale redonne un sens au lien profond qui les a réunis. Comme le dit si bien Bree. « Je suis venue pour sauver mes parents et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour sauver notre fille ». 

 

Alors que Bree et Roger se questionnent sur leur futur voyage, Claire fait les cent pas dans sa chambre, ressassant ce qu’elle sait pourtant irréalisable. 

"Si j’étais là-bas... si j’avais le matériel… si j’étais secondée"… si et si…  

"Peut-être que je pourrais", reprend Claire, décidée à évaluer chaque recoin des éventuels et des invraisemblables. "J’ai fait un stage en cardiologie. J’ai assisté à une opération, j’ai aidé. Je sens déjà mes doigts qui se mettent déjà au travail"… 

Mais le semblant d’espoir se confronte à la réalité.

"Mais c’est impossible" ! s’énerve-t-elle à nouveau, défaisant la liste précédente par un nombre équivalent de ce qui lui manque.

"Je n’ai pas de bloc opératoire et pas d’infirmière. En plus, opérer un nourrisson c’est"…

 

Jamie l’interrompt pour mettre fin à ce tourment insupportable. 

"Il y a une chose que nous pouvons faire. Je sais que ce n’est pas tellement dans tes habitudes, mais… Je trouve que cela apaise l’âme". 

 

J'ai beaucoup apprécié le fait que Jamie décide d’adresser leurs prières à St Eloi, le saint patron des cavaliers, petit clin d’œil à sa balade avec Mandy dans les écuries. 

 – Et quel est le rapport avec un nourrisson souffrant ? lui demande Claire, qui, plus calme, s’est agenouillée à ses côtés.

 – Si tu veux savoir, c’est entre moi et la toute petite, mais je sais que St Eloi va veiller sur elle, si on lui demande. 

 

Je ne peux pas m’empêcher de faire le parallèle avec la scène de l’épisode 701 lorsque Roger adresse une courte prière à Dieu pour aider Wendigo à s’aider lui-même. Cet appel à la prière de Jamie est tellement plus respectueux !

 Je veux dire. Moi-même athée, je me serai agenouillée à leurs côtés et j’aurais demandé l’aide à St Eloi de toutes mes forces, avec l’espoir farouche que cela ferait pencher la balance du bon côté.

D’une certaine manière, c’est une deuxième partie qui commence, alors que la caméra dézoome sur la grande maison.

J’ai eu une boule au ventre lorsqu’ils l’ont quittée. Je me suis dit : les pauvres, ils viennent juste de la retrouver. N’auront-ils jamais le droit d’être heureux, chez eux ? Comme ils l’ont toujours souhaité ?

Les voilà donc tous en route pour Wilmington en quête de pierres précieuses pour que tous les McKenzie puissent traverser. Ils iront ensuite aux menhirs sur l’île d’Okracok, ceux par lesquels Wendigo et ses amis sont passés.

 

 

Les rencontres et les adieux 

 

Arrivés à Wilmington, les uns et les autres se séparent afin d’être plus performants.

Bree, de retour de la boulangerie remarque de l’autre côté de la rue, Lord John et William, qu’elle reconnait grâce au portrait que Jamie lui a montré.

"Jésus H. Roosevelt Christ", dit-elle en version originale, reprenant à son compte l’expression favorite de sa mère, alors que la version française lui octroie un pauvre : « Par tous les saints et par Roosevelt ».

Mais pourquoi ? Pourquoi ne pas continuer de traduire l’expression de Claire en Français comme ils l’ont toujours fait ! « Nom d’un Franklin, c’est pas Dieu possible ! » Mystère.

 

Sans hésiter, elle va à leur rencontre. Enfin, nous croisons William adulte. 

 

Il y a celles et ceux qui ont lu les livres, et les autres.

Ici, la différence est particulièrement importante. Dans le livre et à ce niveau de l’histoire, Bree ne sait toujours pas qu’elle a un frère.

Se baladant sur les quais avec Roger, elle aperçoit Lord John discutant avec un homme qu’elle prend tout d’abord pour son père, se demandant durant quelques secondes pourquoi il est déguisé en soldat anglais. Puis elle remarque la couleur des cheveux, la jeunesse de sa posture et ellle comprend que c'est le fils de Jamie. Ça ne peut faire aucun doute.   

Lorsqu’elle les rejoint, toujours accompagnée de Roger, la situation est pour le moins tendue ! Lord John est dans ses petits souliers, Roger reste muet et Bree parvient, non sans mal, à cacher un sentiment de stupeur mêlé à de la colère. Pourtant, elle ne vend pas la mèche. William quant à lui ne remarque rien. Comment pourrait-il se douter un seul instant ?

  

Dans la série, Bree est déjà informée. Jamie lui a montré son portrait et lui a expliqué les circonstances de sa naissance. Elle en a également discuté avec John, ayant eu le temps de se faire à l’idée d’avoir un frère persuadé d’être le neuvième comte d’Ellesmere.  Par le fait, leur rencontre à Wilmington est un moment de simple bonheur.

Comme ceci est un focus de l’épisode, je vais donc m’attacher à ce qu’il nous raconte.

 

John et Bree ont une relation particulière depuis leur première rencontre chez Jocasta Cameron et assez vite, Lord John peut se détendre, comprenant que Bree gardera le secret vis-à-vis de William.

Il est jeune, il est plein de fougue et de l’envie d’en découdre avec l'ennemi. Bref, il est surement comme son père au même âge. Je trouve que Bree joue vraiment son rôle de « grande sœur », tolérante vis-à-vis de la naïveté de son frère.

« Un homme intelligent a dit un jour : le meilleur moyen pour vaincre un ennemi, c’est de s’en faire un ami ».

Ce à quoi William, dont nous sentons l’impatience d’affronter rapidement les révolutionnaires lui répond :

« Parfois, le seul moyen de régler les choses, c’est dans le sang, et par l’épée ». 

Peut-être qu’en d’autres temps, et surtout, en d’autres circonstances, Bree aurait profité de l’occasion pour une joute verbale. Mais elle sent bien que ce n’est pas la peine avec William, d'autant qu'il est plus que probable qu'elle ne le reverra jamais.

 

Alors qu’ils discutent, Jamie arrive à son tour de l’autre côté de la rue.

Le plan se fixe sur son visage. Celui d’un homme qui, pour la première fois (et peut-être la dernière), admire ses deux enfants côte à côte. C’est également la première fois qu’il voit son fils devenu adulte.

On peut lire dans ses yeux la surprise, l’amour, la fierté, et finalement, de la tristesse.

Il croise le regard de John et tous deux, d’un simple mouvement de tête d’une rare subtilité, se disent bonjour et s’accordent, comme toujours, à garder le secret pour le bien de William.

Jamie s’en va afin de ne pas se faire repérer. Je ne sais pas pour vous, mais cela m’a déchiré le cœur.

 

William prend congé. C’est le premier « Adieu » d’une longue liste à suivre.

 

"Merci pour votre discrétion", dit John à Bree, rassuré que les choses se soient aussi bien passées.

S’en suit une discussion très importante sur William et son droit de connaître la vérité sur ses origines. 

Tout d’abord John s’emporte, enfin… s’emporter à la façon de John ! C’est-à-dire, être un peu moins doux que d’habitude. Puis il se reprend.

 –Je suis le seul et unique père que William n’ait jamais connu. Savez vous ce que cela lui ferait de l’apprendre maintenant ? 

 

J’ai beaucoup apprécié l’attitude de Bree. Elle aurait pu réagir vivement en argumentant que, oui, justement, elle le sait ! Elle aurait pu l’affronter, même s'il est sûrement difficile d’affronter Lord John, si mesuré.

Mais à la place, elle a pris le temps de s'accorder à son pas et de lui raconter son histoire depuis le début. 

Elle avait un père. Il est mort, mais elle l’a toujours aimé. Même lorsqu’elle a découvert Jamie, si merveilleux qu’elle ne trouve même pas un qualificatif pour le décrire, elle a continué d’aimer son père. Elle l’aimera toute sa vie.

La séquence se finit sur l’incroyable sourire de Lord John. Et je n’ai pu m’empêcher de me rappeler les paroles de Bree lors de l’épisode 411, Tel père telle fille :  « Lord John, il est impossible de ne pas vous aimer ».

La scène suivante est très certainement celle qui m’a le plus émue de tout l’épisode, euh, enfin l'une d'elle dans la mesure ou tout l'épisode m'a émue. 

 

Jamie vient rendre visite à Lord John dans sa chambre d’auberge.

Dans le livre, cette scène se passe par l’entremise de courriers, mais j’ai adoré qu’on nous la propose avec les deux amis en présence. 

Tout d’abord, Jamie décline l’offre de boire un verre de whisky, ce qui n’est pas anodin de sa part. John se méprend sur ce refus.

"Nous sommes, comme tu le disais, chacun d’un côté de l’histoire". 

Peut-être dans l’espoir de convaincre Jamie, ou pour s’excuser de ne pas être dans le même camp que lui, il continue.

"Au parlement, j’ai entendu dire que l’Amérique était un enfant qui avait déshonoré son père et qu’il fallait lui donner une leçon". 

Quelle bonne idée d’articuler cette discussion de cette manière, permettant ainsi à Jamie de faire le lien avec William.

"Tôt ou tard, il arrive un moment ou un enfant doit quitter son père", commence-t-il. 

Des mots doublement éloquents pour lui puisqu’il ne peut pas rencontrer son fils et qu’il va prochainement dire adieu à Bree, à Roger et à ses deux petits-enfants. 

 

Ils parlent un moment de William, de son envie d’entrer dans l’armée.

 – Il est fougueux… 

 – Comme son père ! 

Des propos de Bree quant à son droit de connaître son origine.

 – Elle a ses propres opinions. 

 –  Comme sa mère ! 

 C’est un moment plus léger, pour leur permettre de faire perdurer leur complicité alors que tous deux savent que ce ne sera bientôt plus possible.

 

Finalement, Jamie accepte le verre de Whisky.

Ils vont devoir parler de choses plus graves. 

 

 – Tu ne te battras pas pour la Couronne ? Ne serait-ce que pour être dans le même camp que ton fils ? 

 – Le jour où j’ai remporté mon parrain mort depuis le champ de bataille d’Alamance, je me suis juré de ne plus jamais me battre avec l’armée britannique. 

Ils savaient, l’un et l’autre que ce moment arriverait, où ils ne pourraient plus nier cette divergence capitale. Tant que la paix persistait, cela pouvait passer, mais à la veille de la révolution, ils doivent assumer leur camp.

 

Le jeu des acteurs déjà merveilleux touche ici au sublime. Ce duo Sam Heughan/David Berry me semble plus admirable à chaque rencontre.

 

 – Continuer à être en relation ne peut s’avérer que dangereux pour toi et moi, commence Jamie sur un ton coupant.

Une froideur non pas dirigée vers John bien sûr, d’ailleurs, face au regard désemparé de celui-ci, il prend le temps de se calmer et reprend plus doucement, presque avec tendresse.

 – J’ai bien peur que nous devions rompre toutes formes de lien. 

 – Cette maudite guerre ! lui répond John, les yeux embués par les larmes.

N'oublions pas que John a déjà perdu son amant, Hector, lors de la bataille de Culloden, et voilà qu’à nouveau, il risque de perdre celui qu’il aime depuis plus de 20 ans.

 

Je regarde le jeu d’acteur de Sam Heughan : les regards vers John ; tout ce qui se passe derrière son visage et, je repense à la personne que j’ai appris à connaitre par l’entremise de son autobiographie : Waypoint. Je constate alors cette incroyable compassion qui transpire de ses écrits. Je suis alors certaine que les larmes emplissant ses yeux sont réelles, car il n’est jamais insensible à la souffrance d’autrui.

 – Crois-moi. Même en silence, je resterai ton plus grand et ton plus humble ami. 

 

John ouvre son gilet et en retire le saphir que Jamie lui avait donné à Ardsmuir. Une pierre que nous connaissons bien puisqu’elle était au cendre de l’épisode 312, "la Bakra".

"Je l’ai gardée avec moi ces 20 dernières années" dit-il, ému.

Et c’est un fait que John n’a jamais cherché à cacher la nature de ses sentiments pour Jamie. Cela fait partie des choses que j’apprécie le plus chez lui. L’honnêteté.

Il pose la pierre dans la main de Jamie et referme la sienne par-dessus.

"Pour Brianna". 

Leurs adieux son déchirants et nul doute que Jamie souffre autant que John de cet éloignement forcé. Peut-être qu’ils se demandent, l’un et l’autre s’ils seront contraints un jour prochain, de s’affronter sur le champ de bataille.

 

… Petit aparté pour dire que, dans le livre, c’est la bague d’Hector que John remet à Jamie, et non le Saphir qu’il garde pour lui, ce qui, au passage, en dit long sur celle dont il ne peut se défaire. Mais Hector n’ayant été évoqué qu’une toute petite fois durant la saison 3, sa bague n’aurait pas eu la même force symbolique que ce saphir dont tout le monde se souvient.  

De retour à l’auberge, Jamie retrouve le reste de la famille. Ils possèdent désormais suffisamment de gemmes pour que tous les McKenzie puissent traverser les pierres.

 

Pour leur dernière soirée ensemble, Jamie entraine Bree au-dehors pour une conversation privée.

Nous avons droit à un mixte de deux chapitres du lilvre que les scénaristes ont superbement réunis dans une seule scène. Tout d'abord, la discussion à propos de Disneyland tandis qu'une nuée de lucioles les entourent, scène qui donne d’ailleurs son titre à l’épisode, « l’endroit le plus heureux de la terre » puis celle durant laquelle Bree imagine son père au 20e siècle.

 

 

 J'y ai pensé, parfois, admit Jamie. Je me suis demandé : « Si je pouvais, comment ce serait ? » 

     Il regarda Brianna en souriant, mais la mine un peu triste. 

     – Qu'en penses-tu, ma fille ? Que deviendrais-je là-bas ? 

     – Eh bien... 

     Elle s'interrompit, essayant de l'imaginer derrière le volant d'une voiture, se rendant au bureau dans un costume trois-pièces. C'était si absurde qu'elle se mit à rire. Ou assis dans un cinéma, visionnant un film de Godzilla avec Jemmy et Roger. 

     – Jamie à l'envers, ça donne quoi ? l'interrogea-t-elle. 

     – Eimaj, répondit-il intrigué. Pourquoi ? 

     – Tu t'en sortirais très bien. Non, laisse tomber. Tu pourrais... publier des journaux, par exemple. Les presses sont beaucoup plus grandes et rapides, et il faut beaucoup plus de gens pour recueillir les informations, mais autrement... je ne pense pas que ce soit si différent d'aujourd'hui. Et tu connais déjà le métier. 

     Il hocha la tête, concentré. 

     – Oui, sans doute. Je ne pourrais pas être fermier ? Les gens continueront bien de se nourrir ; il leur faudra des cultivateurs. 

     – Oui, tu pourrais. 

     Elle regarda autour d'eux les poules qui picoraient dans la cour, les planches rugueuses et décolorées de l'écurie, le monticule de terre retournée près de la tanière de la truie blanche, autant de détails familiers qu'elle semblait redécouvrir. 

     – Il existe encore des gens qui travaillent comme ici. Des petites exploitations dans les montagnes. C'est une vie rude. 

     Elle le vit sourire et éclata de nouveau de rire. 

     – Bon d'accord, pas aussi dure qu'ici..., mais la vie est nettement plus facile en ville. 

     Elle réfléchit un instant avant d'ajouter : 

     – Tu n'aurais plus besoin de te battre. 

     – Ah non ? Mais tu m'as raconté qu'il y avait plein de guerres. 

     – C'est vrai 

Des images douloureuses lui revinrent en mémoire : des champs de pavots, des étendues de croix blanches... un homme en feu, une enfant nue courant sur une route, la peau calcinée, la grimace insupportable d'un homme une seconde avant qu'une balle ne lui brûle le cerveau. 

     – Mais... ce ne sont que les hommes jeunes qui partent à la guerre. Et pas tous, seulement quelques-uns. 

     – Mmphm... 

     Il demeura songeur, puis sonda le regard de sa fille. 

     – Ton monde, cette Amérique, cette liberté vers laquelle tu vas... Il y aura un prix terrible à payer. Cela en vaut-il vraiment la peine ? 

     Ce fut au tour de Brianna de rester silencieuse et de méditer sur la question. Enfin, elle posa la main sur la sienne, solide, chaude et ferme. 

     – Il n'y a presque rien qui vaille la peine de te perdre, murmura-t-elle. Sauf peut-être ça. 

 

La neige et la cendre, chapitre 119, Ne t’en va pas.

La discussion avec sa fille semble avoir apaisé Jamie. Une fois dans la chambre avec Claire, il lui raconte un rêve qu’il a fait d’elle alors qu’elle était dans le passé.

C’est une scène qui, dans le livre, apparait bien plus tôt ! Mais j’ai trouvé que c’était une bonne idée de la glisser là, afin de l’articuler avec celle qui suit.

 

J'ai rêvé de toi. Je ne savais pas où j'étais. Mais je savais que c'était là-bas, dans ton temps. 

     Cette fois, tous les poils de mon corps se hérissèrent. 

     – Comment le sais-tu ? Qu'est-ce que je faisais ? Il plissa le front. 

     – Je ne m'en rappelle plus, mais j'ai su que j'étais dans ton époque, à la lumière. Oui, c'est ça ! Tu étais assise à ton bureau, tenant un objet à la main, peut-être une plume. Il y avait de la clarté partout autour de toi, sur ton visage, tes cheveux. Mais elle ne provenait ni d'une chandelle, ni d'un feu, ni du soleil. Je me souviens d'avoir pensé : « Alors, c'est ça, la fameuse lumière électrique ! » 

     Je le fixai, médusée. 

     – Comment peux-tu reconnaître en rêve ce que tu n'as jamais vu dans ta vie réelle ? 

     – Je rêve tout le temps de choses que je n'ai jamais vues, Sassenach, pas toi ? 

     – Oui, parfois. De monstres, de plantes étranges, de paysages bizarres. Et de gens que je ne connais pas. Mais là, c'est différent. Tu as entendu parler d'électricité, mais tu ne l'as jamais vue. 

     – Peut-être que ce n'en était pas, admit-il, mais, sur le coup, j'ai pensé à ça. En outre, j'étais certain d'être à ton époque. Après tout, je rêve du passé, pourquoi ne rêverais-je pas du futur ? 

     Je ne trouvai rien à répondre à cette logique toute celtique 

  

La neige et la cendre, chapitre 68, Les sauvages

 

 

Et parce que, justement, il a parlé avec Bree à propos du futur et de son incapacité à les suivre, Jamie semble avoir réfléchi à la posture de Claire.

Il ouvre le tiroir de sa table de nuit et sort une toute petite gemme. Il l’avait gardée depuis des années au cas où il mourait, afin que Claire puisse retourner en sécurité dans le futur.

 – Tu veux peut-être les suivre maintenant, lui dit-il, alors que nous savons que cela lui arracherait le cœur.

Sans hésiter une seconde, Claire se lève et jette la pierre par la fenêtre.

Il est évident que son choix est fait.

 

Les adieux. 

 

Nous suivons notre petite troupe dans une chaloupe, de nuit, en route pour l’ile d’Okracoke.

 

Le plan large et en hauteur sur leur barque fait apparaître leur isolement. Ils sont les seuls à connaître le poids de leur terrible secret et la douleur des choix auxquels ils ont été contrains. 

Lorsque ce sera fini, la famille sera scindée en deux, peut-être pour toujours.

 

En temps normal, j’avoue ne pas être fan des scènes d’adieu qui n’en finissent pas. Mais ici, j’ai trouvé important qu’ils prennent leur temps. 

Les trois générations de femmes devant, les trois générations d’homme derrières, ils avancent lentement vers les pierres dressées. Elles sont moins impressionantes que celles de Craigh Na Dun bien qu’elles portent le même pouvoir en elles.

 

Tout est magnifique dans ces adieux croisés. La douleur qui exsude de Bree et les paroles rassurantes de sa mère. La déclaration d’amour spontanée du petit Jemmy à sa grand-mère, les propos de Jamie envers Roger à propos de la confiance qu’il place en lui.

"Je suis fier de toi Roger Mac. Il n’y a personne d’autre à qui je confierai la vie de ma fille et de mes petits-enfants". 

 

Celles et ceux qui me lisent régulièrement savent à quel point j’aime le personnage de Roger, aussi ai-je été incroyablement émue, et reconnaissante que Jamie apprécie ouvertement sa valeur.

"Je suis tellement fier que vous soyez ma famille", répond Roger, tandis que Claire les rejoint.

Et ces mots sont puissants, car il les emploie au présent. Quel que soit le lieu ou le temps, ils resteront une famille.

 

Afin de nous permettre d'alléger notre poitrine, serrée par l’émotion depuis de longues minutes, on nous offre deux moments d’humour tendre.

La première, lorsque Roger promet à Jamie et Claire de raconter leurs aventures aux enfants.

 – Tu n’es pas obligé de raconter celle du serpent, remarque Jamie en souriant.

Et l’autre, adorable, lorsque Jamie dit au revoir à son petit-fils.

 – Si un jour, tu rencontres une énorme souris qui s’appelle Michael, dis-lui que ton grand-père lui présente ses salutations. 

Un petit clin d’œil envers sa discussion avec Bree à propos de Disneyland.  

 

Mais les adieux les plus déchirants sont probablement ceux de Jamie et Bree.

Tant de choses se sont déroulées depuis la saison 4, lorsqu’ils se sont vus pour la première fois dans cette petite ruelle de Wilmington !

Contrairement à ce que j'avais imaginé, c'est Bree qui console son père.

 

 – Je ne peux pas te faire mes adieux, dit-il à sa fille.

 –  Dinna fash. Le jour de tes adieux à maman, au cercle de pierres, alors qu’elle était enceinte de moi, tu lui as dit que j’étais tout ce qu’il lui resterait jamais de toi. Mais toi ! Tu es tellement plus que ça. Je te porterai toujours dans mon cœur et dans mon âme. Et toi aussi, tu me porteras en toi. Rien n’est perdu. Certaines choses changent, c’est tout ! 

 

Et nous nous souvenons de ce très beau passage de la saison 4 lorsque Claire prétendait que ces propos introduisaient le principe de la thermodynamique tandis que Jamie soutenait que c’était la foi.

 

Avant de la quitter, Jamie pose sa main sur la joue de Bree et lui dit :" tu es ma fille chérie", exactement comme il l’avait fait lors de leur première rencontre. J’ai trouvé cela très beau. Très fort.

 

Finalement, accompagnés par la douce musique de Bear McCreary, Bree, Roger et leurs enfants, chacun porteur d’une gemme, s’avancent vers les pierres, et disparaissent.

Claire et Jamie, immobiles et serrés l’un contre l’autre sont comme statufiés.

 – Je continuerai de vivre pour toi, finit par dire Jamie, sans cesser de regarder les menhirs qui ont « avalé » sa famille. Mais si j’étais seul, je ne pourrais plus. 

 

L’épisode aurait pu se finir ici, mais il semble maintenant évident que l’équipe d’Outlander a décidé de prendre son temps pour cette saison, peut-être pour compenser la précédente, écourtée par la pandémie, à moins que ce ne soit parce qu’il y a encore tellement à dire, alors qu’il n’y aura plus qu’une saison à venir. Mais qui va s'en plaindre ?

 

Toujours est-il que, nous voici avec les McKenzie, de l’autre côté des menhirs.

Comme nous avons déjà assisté à cela une fois, lors de l’épisode 512, Never my love, , nous attendons d'avoir la preuve qu'ils sont effectivement passés.  L’idée de superposer l’avion en bois avec lequel Jemmy joue en permanence et l’avion, bien réel cette fois, qui survole leur petit groupe, est merveilleuse. Parfois, une image vaut plus que mille mots. 

Et tandis qu’ils quittent le site des pierres dressées pour ce que nous savons être un long voyage, nous rejoignons Claire et Jamie par le biais d’un fondu enchaîné et d’une variation musicale très réussie.

 

La nuit suivante, Claire est dévastée. Elle n'arrive pas à dormir, elle ne parvient même pas à faire l’amour à Jamie tant son âme est tourmentée.

Elle fait le bilan de tous ceux qui sont partis.

Jamie la prend dans ses bras, malgré son propre chagrin.

"Veux-tu pleurer pour eux, mo nighean donn "? 

Alors elle laisse jaillir les larmes et les sanglots, lâchant sa peine dans les bras de l’homme qu’elle aime.

"Pleure-les, lui dit-il en l’attirant encore plus près de lui. Quand tu seras au bout de tes larmes, je serai là". 

 

Il faudra qu'un jour, je fasse le compte des phrases tout simplement sublimes que Jamie dit à sa femme parce qu’il me semble que celle-ci serait tout en haut de la liste.

Finalement, comme toujours, quel que soit le degré de douleur qui nous accable, le temps passe. Le petit poney de Mandy grandit et galope aux côtés de Jamie, et la voix off de Claire nous explique qu’elle parvient à contenir sa tristesse en se disant que Bree et les siens sont toujours vivants.

Le bébé de Lizzie et des jumeaux Beardsley est né (quelle drôle de phrases !).

"Nous nous fabriquions de nouveaux souvenirs. Nous les ajoutions aux fantômes des souvenirs plus anciens", nous dit la voix de Claire.

Elle conclut que c’est l’endroit le plus heureux de la terre, quoi que le terme, "serein" aurait peut-être mieux convenu.

Mais bel et bien, nous sentons que la vie reprend ses droits et nous nous surprenons presque à désirer que tout s’arrête ici, afin qu’aucun autre drame ne vienne les percuter.

 

Et pourtant.

C’est la fin de journée. Le soleil est en train de se coucher et Claire rentre au bridge avec un panier rempli de victuailles.

Toutes les lumières sont éteintes. À voir son air étonné, nous réalisons que cela n’est pas habituel.

Elle pose ses affaires sur la table et… On entend craquer une allumette. Un bruit tellement inattendu ! Si… anachronique.

Wendigo Donner est là, dans le noir, seul. Il joue avec les allumettes fabriquées par Brianna.

 

Plus perdu que jamais, il explique à Claire qu’il a essayé de traverser les pierres avec une gemme en poche, mais qu’il avait bu une bouteille entière de whisky avant cela, tant il était nerveux. À son réveil, la pierre l’avait « recraché ».

Il attend d’elle qu’elle lui explique comme faire pour que ça marche, et il veut également une autre gemme, la sienne ayant disparu après sa tentative.

Débarquent alors deux complices, l'un tenant Jamie ligoté. Ils n’ont rien trouvé à l’étage, mais ont repéré dans les affaires de Murdina Bug, un petit lingot d’or.

Ceux qui ont lu les livres savent ce que c’est. Pour les autres, je n’en dirai pas plus.

 

Rien ne calme les intrus et tout va trop vite pour que Claire et Jamie aient le temps d’arrêter ce qui est en train de se produire.

À la recherche de pierres précieuses, ou autres choses de valeur, les deux brigands vident les placards de l’office de Claire, jetant à terre les fioles qui se brisent au sol les unes après les autres, jusqu’à celles contenant l’éther.

"On ne voit rien ici", crie l’un d’eux alors que tous ont du mal à respirer à cause des émanations toxiques.

Afin de l’éclairer, Wendigo craque une autre allumette alors que Claire, sachant ce que cela va produire, hurle à plein poumon. 

Une énorme détonation se fait entendre tandis que nous sommes aveuglés par la lumière vive.

 

Le plan final est extérieur, à une centaine de mètres de la grande maison en flamme, comme Brianna et Roger l’ont lu dans un journal,  avant de traverser les pierres quelques années auparavant.

 

 

Peut-être, est-ce le plus bel épisode, toutes saisons confondues.