3 - L'impact émotionnel sur le spectateur
Avec les ombres
Les couleurs vives
Couleur des fonds
Suppléments
La forme des ombres
  1 - Descriptions détaillées
2 - L'état d'esprit des personnages

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Par Gratianne Garcia

La lumière est un matériau. En art, elle ne sert pas seulement à éclairer.  

Elle véhicule un message qui lui est propre. C’est un vecteur émotionnel, source de dialogue avec le spectateur qui vibre, tremble et peut s’identifier aux personnages.

La lumière n’agit pas seule. L’interaction entre les ombres, les couleurs et le décor, crée des ambiances qui contribuent à accroître un retentissement émotif chez le spectateur.

 

//  La lumière avec les ombres pour créer une ambiance et plonger le spectateur dans un état d’esprit voulu par le réalisateur afin d’exprimer clairement un message au service de la narration.

La lumière dans la sixième saison 

3 - L’impact émotionnel  

sur le spectateur  

Dans ces deux scènes de l’épisode 1, c’est volontairement très sombre. Les ombres engloutissent notre regard et nous enfoncent dans la dépression de Fergus. Seule Marsali est éclairée en gros plan, l’espoir va venir d’elle. Ici, ce sont les ombres qui ont du mal à rivaliser avec les minuscules sources de lumière, qui nous font partager leur état psychologique.

L’obscurité nous rend mal à l’aise, c’est effrayant pour beaucoup de personnes et impacte profondément notre émotivité.

Histoire sans parole, le dialogue entre Jamie et Lizzie est symbolisé par ce jeu d’ombres et de lumière, positif et négatif. Et communique avec le spectateur à travers cet échange, ce dernier comprend, ressent les éléments importants du scénario

Claire et ses démons : Particulièrement dans l’épisode 7, elle est noyée dans les ténèbres de son traumatisme et nous entraîne dans la pénombre avec elle. C’est gluant d’angoisse. Au milieu, Lionel Brown apparait avec « un éclairage d’horreur » dans le langage cinématographique qui est une lumière crue située au-dessus du sujet révélée par le noir sinistre des ombres trop fortes. Le spectateur est très mal à l’aise et finit par redouter ces scènes de désarroi.

Dans ces deux photos, le spectateur partage leur bonheur d’être ensemble. La luminosité qui reproduit la lumière naturelle en extérieur fait scintiller les couleurs et pétiller notre émotion. Seuls les contrastes de leurs visages et de leurs mains se détachent sur des couleurs sombres.

 

Claire et Jamie enlacés dans leur chambre, forment un cœur avec leurs bras réunis ce qui focalise notre regard sur ce moment heureux.

// La lumière associée à la couleur des fonds, créatrice d’atmosphère. 

 

«  La couleur parle aux sens et embrouille l’esprit » - James Agee romancier américain - C’est exactement ce que font les réalisateurs et le directeur de la photographie dans la saison 6 de la série d’Outlander pour provoquer l’état émotionnel dans lequel ils souhaitent plonger le spectateur. Les couleurs et les décors sur lesquels se détachent les personnes sont soignés et très évocateurs.

Jeux de couleurs dans le décor pour créer une atmosphère riche et chaleureuse. La grande maison est celle du propriétaire terrien, Jamie est un Laird et nous le ressentons devant cet étalage de couleurs éclatantes, de matières agréables et confortables.

 

L’intérieur est lumineux et fait vibrer la juxtaposition des couleurs chaudes avec les couleurs froides, ce qui nous fait ressentir la splendeur du lieu, et la chaleur de ses occupants.

L’heure est sombre pour Lord John, tout comme le vert terne des murs du bureau du gouverneur. Cela ne présage rien de bon, le spectateur doit le ressentir.

Épisode 3, Fergus est dévasté. La naissance de son fils différent le ramène à son enfance et à son handicap, Nous sommes plongés avec lui dans son désespoir. Le faible contraste de la silhouette des arbres représente ses sentiments, tout en nuances de gris froids et sourds, rectilignes ou flous. Ils matérialisent sa confusion et nous la communique. Le spectateur ressent profondément cette immense tristesse.

Ici, la lumière est douce pour créer une ambiance affectueuse et familiale, le tout eset baigné dans un camaïeu de bruns chauds, qui donne envie de partager leur repas et leur bonne humeur. On est avec eux.

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Ici, dans l’épisode 6, pendant les accusations de Malva, ce sont les ombres qui donnent le ton et nous touchent. C’est terriblement angoissant, avec la silhouette floue d’Allan en arrière-plan. Voilà le genre d’image qui marque notre mémoire et déclenche un malaise ressenti presque physiquement.

L’épisode 8 est celui de tous les dangers, le spectateur tremble et lutte avec eux du début à la fin. Dans cette scène nocturne, Claire et Jamie, à peine visibles sont engloutis par les ombres qui envahissent toute la scène. Ce noir prégnant, révèle une lumière dangereuse symbolisée par les éclats de verre et le feu.

 

Tout est fait pour embarquer le spectateur dans cet univers aux nuances subtiles qui laisse parler les émotions. La peur de Claire et de Jamie qui est de périr dans l’incendie de leur maison et la nôtre de les voir en danger imminent. Communiqué par la forte luminosité du foyer qui se reflète sur le sol et les entoure comme si le feu se propageait.

 

//  La lumière associée à une couleur vive va créer des émotions positives. L’ambiance de la scène devient détendue et rend le spectateur heureux. Les ombres très discrètes, ne sont utilisées que pour produire un contraste et mettre les personnages en avant. 


Dans l’épisode 2, cette rencontre fait vivre un ascenseur émotionnel au spectateur entre l’empathie positive de Brianna baignée dans une lumière aux couleurs chaudes et la tristesse de Ian enveloppé dans une obscurité froide.

 

//  La lumière et les formes des ombres en interaction sur les fonds pour créer une image percutante et impacter fortement les émotions du spectateur. 

Effets visuels très expressifs, réalisés avec une nouvelle technique d’éclairage utilisée pour renforcer le caractère dramatique de cette saison, comme l’explique Alasdair Walker le directeur de la photographie. « Un changement significatif par rapport aux saisons précédentes a été le passage du tungstène au travail presque exclusivement avec LED. « Nous travaillons avec beaucoup de flamme et de source ponctuelle, donc le fait de pouvoir correspondre à cela a été rendu beaucoup plus facile grâce aux récentes avancées de l'éclairage LED » - Article en annexe à la fin du document -

C’est un contraste violent auquel s’ajoute un jeu d’ombres et de lignes qui nous fait partager son désespoir et sa colère

Épisode 3, de manière différente, les arbres aux troncs drus et piquants servent de fond à cette scène douce-amère. La lumière les dessine avec un fort clair-obscur qui amène le spectateur à ressentir une menace.

Nous sentons que la situation est significative pour les personnages, mais notre attention est attirée vers des détails apparemment sans importance, inconnus des protagonistes puisque ce sont les cadrages sur le jeu d’ombres et de lumières du fond qui les mettent en évidence.

L’arc narratif est ici figuré avec des formes abstraites anguleuses, agressives et très contrastées. Dessinées avec un contre-jour derrière les personnages, elles renforcent le processus émotif du spectateur.

Nous devons ressentir Malva comme étant l’incarnation du diable dont les cornes sont très bien représentées par la lumière vive de deux bougies au dessus de sa tête.

Une lumière graphique sur les fonds répercute le drame humain qui est en train de se jouer autour de Malva. Un malaise profond envahit le spectateur, aussi bien dans la tente de Tom Christie, que sur les rideaux de la grande maison ou sur la misérable cloison du mangeur de péchés. Les ombres dessinent avec une lumière crue venant de l’extérieur, des formes aiguisées et nettes qui représentent des éclats de verre ou des lames de couteau. Couteau que justement tient Malva à ce moment-là dans sa main. C’est glaçant.

Épisode 7, un magnifique jeu de contre-jour nous fait partager leur profonde angoisse. C’est inquiétant à regarder, rigide et froid. Claire a fait le vide autour d’elle, cette lumière aveuglante la sépare de la réalité et de Jamie. Pourtant, il est en marche vers elle. La succession de portes ouvertes sur l’extérieur, cernées par un rai de lumière, fait ressentir la peur de la situation et leur détresse affective. Son visage éclairé nous révèle son cheminement. Elle va entamer son autocritique et passer de l’ombre à la lumière avec Jamie. Cette terrible situation devient la nôtre en nous impliquant visuellement avec eux

«  Dans la peinture, il s’établit comme un pont mystérieux entre l’âme des personnages et celle du spectateur » Eugène Delacroix - Peintre français XIX° siècle - 

 

Bien que chaque image, chaque plan, chacune des scènes aient forcément un impact sur le spectateur, j’ai dû faire des choix. Loin d’être exhaustive, cette analyse ne prend pas en compte la musique qui contribue beaucoup à l’impact émotionnel sur le spectateur. Il y a un lien intime qui se crée entre les images et la musique de Bear McCreary.  

L’émotion est ce qui touche l’humain et fait écho en nous. 

C’est une saison très sombre pour les héros et le réalisateur a parfaitement fait ressentir cette insécurité quant à l’avenir du pays. De plus, les problèmes psychologiques et les traumatismes personnels viennent s’additionner à leur quotidien et assombrissent le tableau. Comme s’il n’y avait pas assez d’une guerre, la mesquinerie, l’envie, la jalousie, la médisance… Ils ont vieilli, la situation politique est incertaine. Claire et Jamie vont de nouveau devoir faire preuve d’une grande résilience. Elle est annoncée par le galop final sur la plage … 

— Pour en savoir plus sur la musique dans la série : https://www.dinna-fash-sassenach.com/musique.html 

 

— Pour en savoir plus sur le travail de la lumière dans la réalisation de la série, je vous invite vivement à les ces deux articles même si c’est parfois technique. C’est très intéressant :

1— « The Making of Outlander – The official guide to seasons 1&2 par Tara Bennett, introduction by Diana Gabaldon “.

1– « The Making of Outlander – The official guide to seasons 1&2 par Tara Bennett »
 Ronald Moore le producteur a donné pour mission à John Dahl le réalisateur de rendre sale l’esthétique dans le château. : « c’est toujours sale mais éclairé magnifiquement » dit le réalisateur en riant. « La suie est arrivée honnêtement aussi, car Dahl dit que les producteurs voulaient que les décors de Jon Gary Steele soient éclairés par de vraies bougies pour créer une ambiance lugubre authentique. « Elles (les bougies) étaient doubles, car David Higgs [chef-opérateur] était un peu préoccupé par la luminance qu'elles dégageaient. Je ne sais pas combien de centaines de bougies se trouvaient sur les lustres. Elles étaient sur un système de poulies, de sorte que vous pouvez les abaisser, les remplacer, puis les allumer, et enfin les remonter. Si nous devions nous arrêter pour une longue période, on les descendait et on les éteignait. Je pense que nous avons utilisé des centaines de bougies le premier jour de tournage dans cette grande salle de bal, parce que les bougies à double mèche brûlent deux fois plus vite qu'une bougie à mèche normale. Et de temps en temps, un des figurants sentait de la cire chaude qui descendait dans sa nuque. » ... Et nous voilà embarqués et subjugués par l’authenticité dans l’intérieur du château de Leoch au XVIII°, grâce à la lumière des bougies !

2— Alasdair Walker, directeur de la photographie, et Scott Napier, chef électricien, parlent de l'éclairage et de la capture du monde d'Outlander.

 

Maintenant dans sa sixième saison, la série dramatique historique Outlander repousse une fois de plus les limites créatives et techniques. L'aventure de voyage dans le temps tourne autour de Claire Randall, une infirmière de combat anglaise mystérieusement transportée dans le temps de 1945 à 1743.

 

"C'est une vaste production et un peu comme un road movie qui a commencé à voyager dans toute l'Écosse avant de s'aventurer plus loin tout en sautant dans le temps", dit Scott Napier, qui fait partie de la série depuis sa création. Cette exploration de différentes périodes dans le temps et de mondes disparates a également séduit le directeur de la photographie Alasdair Walker qui a tourné des micros pour la première et la deuxième série avant de rejoindre la production à temps plein de la troisième série, explique : « Les showrunners ( producteurs exécutifs) sont désireux d'explorer différents looks en fonction de l'histoire au fur et à mesure qu'elle se déplace dans le temps, en particulier au cours de la dernière saison qui a vraiment poussé le langage visuel utilisé ». Commençant en Écosse et dans certaines parties de l'Europe pendant la Seconde Guerre mondiale, l'aventure de globe-trotter a également vu les personnages explorer la Jamaïque et le Nouveau Monde, ce qui a emmené l'équipe au Cap, en Afrique du Sud, pour le tournage. L'abondance de couleurs et de vibrations dirigées par les costumes a souvent contrasté avec le cadre sombre et plus frais de l'Écosse, où une grande partie de l'action se déroule.

 

«  Cette saison, les personnages vont dans des endroits très sombres », dit Walker. « En travaillant avec le réalisateur Jamie Payne, nous avons repoussé les limites et utilisé des objectifs assez larges et des effets de lumière pour créer un sentiment sombre et paranoïaque. Il y a aussi une touche légèrement occidentale dans cette série qui a été influencée par des films tels que The Assassination of Jesse James d'Andrew Dominik, tourné par Roger Deakins CBE BSC ASC. » Walker a choisi de tourner la série six sur les ARRI Mini LF et ARRI Signature Primes car ils offraient le format plus grand et la faible profondeur de champ nécessaires. « L'espace colorimétrique est impressionnant, et j'aime la façon dont la caméra gère les tons de peau et les ombres dans les scènes nocturnes. Les objectifs sont si polyvalents, avec peu de bruit, ce qui est rassurant car nous travaillons souvent à faible luminosité. » Un changement significatif par rapport aux saisons précédentes a été le passage du tungstène au travail presque exclusivement avec LED.« Nous travaillons avec beaucoup de flamme et de source ponctuelle, donc le fait de pouvoir correspondre à cela a été rendu beaucoup plus facile grâce aux récentes avancées de l'éclairage LED », explique Walker. Cette saison, l'équipe a ajouté des panneaux souples LED Litepanels Gemini 2×1 à sa gamme, après avoir impressionné Napier sur une production récente. « J'ai été vraiment impressionné par le rendu des couleurs et par la façon dont ils excellent dans le haut et le bas de gamme », dit-il. « Nous en mettons généralement quatre ou cinq dans un tableau, et nous fixons les niveaux, en travaillant en étroite collaboration avec le DIT, pour créer une modélisation douce autour d'eux. Il est très facile, même sur des verres larges, de créer cette douceur sur les tons de peau et ils correspondent vraiment bien à l'espace colorimétrique de l'ARRI Mini LF », ajoute Walker. « Nous trouvons également que la qualité de lumière émise par les Gémeaux est vraiment élevée lors de la mesure avec un spectromètre. » Souvent ayant besoin de se déplacer rapidement pendant le tournage, l'équipe utilise des boîtes souples sur mesure chargées de lumières LED pour passer facilement d'un look à l'autre. « Nous avons plus de temps pour le pré-éclairage que certains spectacles sur lesquels j'ai travaillé, mais les progrès de la technologie d'éclairage nous ont rendu la vie beaucoup plus facile et nous ont permis d'expérimenter et de changer rapidement les looks », dit Walker. Travailler avec des objectifs plus larges sur les dernières séries nécessitait une approche d'éclairage différente. « L'accordabilité des LED a été très utile et le fait de travailler avec des systèmes sans fil pour régler facilement les lumières et équilibrer tout ce qui se trouve à partir du moniteur a permis de gagner beaucoup de temps », explique Napier. Lorsque certains personnages rencontrent des difficultés dans la série, Walker a combiné l'utilisation d'objectifs larges avec un ARRI Orbiter hors caméra pour créer la sensation du soleil s'enflammer sur l'objectif et l'effet d'entrer dans l'esprit des personnages. Ailleurs, des luminaires étanches tels que le Creamsource Vortex 8 ont été d'une valeur inestimable lors de la prise de vue dans les conditions météorologiques souvent imprévisibles de l'Écosse. La dernière saison d'Outlander a poussé le langage visuel utilisé

Napier a également développé des solutions d'éclairage sur mesure pour le spectacle axé sur les bougies et le feu. « Nous avions besoin d'un éclairage pour recréer cet effet, mais je ne pouvais rien trouver de tout à fait correct sur le marché, alors j'ai construit des unités LED que je pouvais clignoter à l'aide de quatre canaux et correspondre à peu près avec précision au feu ou

à  la lumière des bougies. » Une scène voit un personnage se réveiller au milieu de la nuit et la bougie qu'elle porte est la seule source de lumière. « Nous avons placé les tubes d'Astera Helios juste à l'extérieur du cadre et nous avions l'impression que l'acteur avait une bougie qui venait de sortir éclairait son voyage », dit Walker. « La capacité à façonner la lumière de cette manière est incroyable et signifie que nous pouvons donner au réalisateur et aux artistes plus de liberté pour se déplacer. » L'exploration par Outlander de différentes périodes dans le temps et de mondes disparates a séduit le directeur de la photographie Alasdair Walker. Outlander a enseigné à Walker la valeur de constituer une équipe fiable d'experts en production. « Je me suis entouré de personnes talentueuses telles que Scott et notre incroyable caméra et l'opérateur de Steadicam Michael Carstensen. Michael a commencé à travailler avec nous lorsque nous tournions la troisième saison en Afrique du Sud et il a tellement impressionné l'équipe qu'il a depuis rejoint l'équipe à temps plein et a déménagé sa famille au Royaume-Uni », explique le PDD. « Être capable de collaborer avec des personnes qui comprennent vraiment ce que vous essayez d'articuler est la clé. Si vous travaillez avec un réalisateur qui a une vraie vision, cela vous permet de vous assurer qu'elle se concrétise. Scott est l'une des personnes les plus organisées avec lesquelles j'ai travaillé, ce qui rend toujours mon travail plus facile et plus agréable et qui fait partie de la raison pour laquelle Outlander a été l'une de mes productions préférées sur laquelle travailler. »